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L’intermédiaire spécialisé est-il astreint à une obligation de conseil à l’occasion de la commercialisation de produits de défiscalisation immobilière ?

UNE FAUTE DELICTUELLE CARACTERISEE PAR LE DEFAUT D’INFORMATION DE LA NON DEDUCTIBILITE DES TRAVAUX

Les faits

Un conseiller en gestion de patrimoine a mis en relation ses clients avec un intermédiaire spécialisé pour la réalisation d’une opération de défiscalisation immobilière.

L’intermédiaire, mandaté par le monteur du programme, faisait valoir la déductibilité de l’ensemble des travaux préconisés.

Or, les investisseurs ont ensuite fait l’objet d’un redressement fiscal fondé sur le caractère non déductible de certain de ces travaux. Partant, ils ont assigné cet intermédiaire spécialisé en responsabilité.

La faute de l’intermédiaire

Bien qu’il ait été mandaté par le promoteur, et non lié contractuellement aux investisseurs, la Cour considère que l’intermédiaire spécialisé a commis une faute délictuelle à leur égard en n’attirant pas leur attention sur la non déductibilité de la majorité des travaux prévus par le programme.

Selon la Cour, l’intermédiaire aurait dû informer les investisseurs que les travaux projetés s’apparentaient à des travaux de reconstruction, non déductibles, ce qu’il ne pouvait ignorer à raison de sa qualité.

La Cour déduit donc de sa qualité de sachant une obligation de conseil dont le manquement est ici sanctionné.

L’OBLIGATION DE CONSEIL TIREE DE LA QUALITE D’INTERMEDIAIRE SPECIALISE

Fondement de l’obligation

La position de la Cour résulte d’une double présomption pesant sur l’intermédiaire :

  • c’est parce qu’il est supposé être en mesure d’identifier la nature des travaux projetés,
  • et d’en connaître la fiscalité y afférente,  que l’intermédiaire spécialisé est astreint à une obligation de conseil à l’égard de l’investisseur.

Or la jurisprudence rendue en la matière est abondante et complexe, de sorte que la frontière entre travaux d’amélioration et de reconstruction est difficilement identifiable.

Portée de l’obligation

L’intermédiaire spécialisé est débiteur d’une obligation de conseil dont l’appréciation du manquement est objective et réside dans « l’échec de la défiscalisation proposée ».

Une telle obligation est transposable au CGP, pour qui l’on peut légitiment supposer qu’il n’a pas été condamné seulement en raison du fait qu’il n’était pas attrait à la cause.

L’arrêt analysé instaure donc une véritable responsabilisation de tout intervenant participant à la commercialisation d’un programme immobilier de défiscalisation.

Bon à savoir

Qu’est-ce qu’un intermédiaire spécialisé ?

La dénomination ne correspond à aucune catégorie professionnelle précise. En l’espèce, (la société Iselection) est une société de commercialisation de programmes immobiliers. La Cour semble donc pouvoir appliquer la qualification d’intermédiaire spécialisé à tout intervenant au programme.

Rappel

L’article 31 du Code Général des Impôts énumère de façon limitative les charges de propriété déductibles des revenus fonciers en fonction de leur nature, et à condition par ailleurs que ces charges soient exposées en vue de l’acquisition ou la conservation d’un revenu.

Pour mention, les travaux de construction, reconstruction ou d’agrandissement, tel qu’il en est question dans l’affaire étudiée, sont expressément qualifiés de non déductibles (Article 31-1-1° b) du CGI).

Contexte

L’arrêt s’inscrit dans le mouvement de responsabilisation des intermédiaires à la commercialisation de produits de défiscalisation, au même titre que le CGP porté garant de la faisabilité de l’opération (Civ. 1ère. 17 juin 2015 n°13-19759) 

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