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Au lendemain de la loi ELAN, quels sont les effets de l’annulation d’un plan local d’urbanisme sur les autorisations d’urbanisme antérieurement délivrées ?

L’article L. 600-12-1 du code de l’urbanisme, créé par l’article 80 de la loi ELAN [1], limite les incidences de l’annulation d’un plan local d’urbanisme sur les décisions relatives à l’utilisation ou l’occupation du sol. Désormais, si l’annulation ou la déclaration d’illégalité du plan local d’urbanisme repose sur un motif étranger aux règles d’urbanisme applicables au projet, la disparition ou l’inapplicabilité de ce document découlant de la décision de justice est sans incidence sur l’autorisation d’urbanisme antérieurement délivrée.

I. La sécurisation des autorisations d’urbanisme délivrées antérieurement à l’annulation du plan local d’urbanisme

Effets classiques de l’illégalité du PLU sur les autorisations délivrées sous son empire

L’article L. 600-12 du code de l’urbanisme [2], dans sa rédaction antérieure à l’intervention de loi « Elan », prévoyait que l’annulation ou la déclaration d’illégalité d’un plan local d’urbanisme avait pour effet de remettre en vigueur le document d‘urbanisme immédiatement antérieur.

Admettant que l’illégalité du PLU puisse avoir des conséquences sur les autorisations d’urbanisme délivrées sous son empire, le Conseil d’Etat a conditionné ces effets à la démonstration de leur non-conformité au document d’urbanisme remis en vigueur :

« (…) il peut être utilement soutenu devant le juge qu'un permis de construire a été délivré sous l'empire d'un document d'urbanisme illégal (…) à la condition que le requérant fasse en outre valoir que ce permis méconnaît les dispositions pertinentes ainsi remises en vigueur ».

CE, 7 février 2008, « Cne de Courbevoie »,
n° 297227, Rec. Leb.

Limitation des effets de l‘illégalité du PLU par la loi “Elan“

La loi « Elan » a introduit dans le code de l’urbanisme l’article L. 600-12-1, réduisant davantage les répercussions des effets de l’illégalité du PLU sur les autorisations d’urbanisme délivrées sous son empire :

« L'annulation ou la déclaration d'illégalité (…) d'un plan local d'urbanisme (…) sont par elles-mêmes sans incidence sur les [autorisations d’urbanisme] délivrées antérieurement à leur prononcé dès lors que ces annulations ou déclarations d'illégalité reposent sur un motif étranger aux règles d'urbanisme applicables au projet. »

L’analyse, dans de telles hypothèses, de la légalité de l’autorisation d’urbanisme apparaît ainsi complexifiée, puisqu’il incombe désormais au juge de trancher au préalable la question de savoir si le motif d’annulation retenu est étranger aux règles d’urbanisme applicables au projet, avant de s’interroger sur la légalité de l’autorisation d’urbanisme au prisme des dispositions de l’ancien PLU remises en vigueur. 

II. Les incertitudes pesant sur la mise en œuvre de ce dispositif protecteur des autorisations d’urbanisme

La nécessaire précision des « motifs étrangers aux règles d’urbanisme applicables au projet »

L’article L. 600-12-1 du CU n’apporte aucun élément permettant  de cerner la notion de « motifs étrangers aux règles d’urbanisme applicables au projet ».

Ainsi que le commentent Mmes Christine Mauguë et Cécile Barrois de Sarigny [4], « (…) cette formule gagnera à être éclairée par la jurisprudence », tout particulièrement sur le point de savoir si un vice de légalité externe affectant le document d’urbanisme constitue, par hypothèse, un motif étranger aux règles d’urbanisme applicables à une autorisation délivrée sous son empire.

Seule la CAA de Marseille [5] semble avoir fait application à ce jour de ces dispositions, jugeant qu’un motif tiré de l’insuffisante motivation des conclusions du commissaire enquêteur et de son rapport « constitue un motif étranger aux règles d’urbanisme applicables au projet ».

La question de l’application de ces dispositions nouvelles aux instances en cours

Reste à savoir si ces dispositions nouvelles sont applicables aux instances en cours.

Sur ce point, la circulaire du 21 décembre 20183 identifie les « mesures d’application immédiate » de la loi Elan, au nombre desquelles figurent celles de l’article L. 600-12-1 du CU, ainsi entrées en vigueur au 1er janvier 2019.

Toutefois, ni cette circulaire, ni la lecture de cette disposition n’apportent de quelconque précision sur l’éventuelle application de ce dispositif aux instances en cours.

La cour administrative d’appel de Marseille [5], a considéré sur ce point – ce qui peut sembler contestable – que l’article L. 600-12-1 du code de l’urbanisme était applicable aux instances en cours (cf. arrêt précité).

Quelques précisions

[1] Loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique dite « ELAN ».

[2] La règle a été initialement posée par par la loi « Bosson » du 9 février 1994 à l’article L. 125-5 du CU, puis reprise par la loi SRU du 13 décembre 2000 à l’article L. 121-8 du même code.

[3] Circulaire du 21 décembre 2018 de présentation des dispositions d’application immédiate de la loi n°2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (ELAN).

[4] RFDA 2019 p. 33.

[5] CAA Marseille, 12 septembre 2019, n° 18MA04244.

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