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Modalités de prise en compte des dettes dans le cadre de l’IFI pour les biens détenus en SCI

Modalités de prise en compte des dettes dans le cadre de l’IFI pour les biens détenus en SCI

La mise en place de l’IFI s’accompagne de dispositions spécifiques quant à la prise en compte des dettes au passif. Ces dispositions prévoient la limitation de ce nouvel impôt aux seuls biens immobiliers non affectés à une activité professionnelle, tout en prévoyant l’exclusion de certaines dettes selon leurs caractéristiques (Cf. notre bulletin du 19 juin 2018). 
Focus sur les modalités d’application de ce nouvel impôt concernant les biens détenus par l’intermédiaire de SCI.

L’ASSIETTE IMPOSABLE DE L’IFI MODULEE PAR DES CLAUSES ANTI-ABUS

Les modalités d’imposition des parts de SCI

Les parts de SCI ne sont passibles de l’IFI que pour la fraction de leur valeur nette représentative de biens ou de droits immobiliers (article 965, 2° du CGI). 

Le calcul de cette fraction imposable se fait en plusieurs étapes : 

  • Calcul de la valeur vénale de la SCI, après réintégration de certaines dettes regardées comme non-déductibles le cas échéant (Cf. cadre suivant)
  • Calcul du ratio immobilier de la SCI (valeur vénale des immeubles ou droits immobiliers imposables détenus par la SCI / valeur vénale de l’ensemble de ses actifs) ; 
  • Calcul de la valeur imposable de la SCI en retraitant sa valeur vénale de la SCI au prorata seulement du ratio immobilier précédemment calculé. Cette valeur imposable n’est alors à retenir qu’à hauteur de la participation du redevable et de son foyer. 

Notons que la détention d’un patrimoine immobilier au travers d’une SCI peut s’avérer plus avantageuse qu’une détention en direct dans la mesure où sa valeur imposable à l’IFI tiendra compte des dettes contractées pour l’acquisition d’autre actifs le cas échéant.

Les dettes dont la déductibilité est exclue

Certaines dettes, contractées pour l’acquisition d’un bien immobilier imposable ou pour le financement de dépenses y afférentes, ne sont par principe pas déductibles pour le calcul de la valeur vénale de la SCI (article 973, II du CGI) : 

  • Celles contractées pour l’acquisition d’un immeuble appartenant à l’associé-redevable ou à un membre de son foyer fiscal dès lors que celui-ci ou ceux-ci contrôle(nt) la SCI ; 
  • Celles contractées :
  1. auprès de l’associé-redevable ou d’un membre de son foyer fiscal,
  2. auprès d’une société contrôlée par le redevable, seul ou le cas échéant conjointement avec d’autres membres de son foyer fiscal ou de son groupe familial proche,

étant précisé que ces deux dernières exclusions ne se font qu’à proportion de la participation détenue par l’associé-redevable et son foyer fiscal au capital de la SCI ;

  • Celles contractées auprès d’un ascendant ou descendant de l’associé-redevable ou des membres de son foyer fiscal, ainsi que leurs frères et sœurs.

Par exception, ces dettes pourront néanmoins être déduites dès lors que peut être justifié :

  • En ce qui concerne les deux premiers points : un objectif autre que principalement fiscal ;
  • En ce qui concerne le troisième point : le caractère normal des conditions du prêt.

LES MODALITES DE PRISE EN COMPTE DES COMPTES COURANTS D’ASSOCIES

Nature des comptes courants d’associé

Un compte courant d’associé constitue une dette de la société envers l’associé qui en est le titulaire. 

De multiples raisons peuvent en être à l’origine (apports de fonds à la société par un associé, paiement d’une dépense pour le compte de la société par un associé, bénéfices en instance de distribution…) mais la cause la plus répandue de création d’un compte courant d’associé réside dans l’hypothèse où la SCI aurait souscrit un emprunt bancaire (seuls les intérêts étant déductibles, la fraction de capital remboursé engendrera un bénéfice qui, faute de trésorerie, ne pourra donner lieu à distribution et sera donc porté au crédit des  comptes courants d’associés).

Pour mémoire, sous le régime de l’ISF, un compte courant était déductible pour la valorisation de la société mais taxable à l’actif du patrimoine de son titulaire : concrètement, la diminution induite sur la valeur vénale de la SCI était « compensée » par sa taxation dans la patrimoine de son titulaire.

Comptes courants d’associé et IFI

Dorénavant, le titulaire d’un compte courant d’associé n’a plus à le comprendre dans son assiette imposable à l’IFI puisque celle-ci se limite aux seuls biens immobiliers non affectés à l’activité professionnelle. 

On pourrait ainsi penser que l’IFI est plus favorable que l’ISF. En réalité, les comptes courants d’associés étant des dettes de la société, ils devront ne pas relever des cas d’exclusion exposés précédemment pour pouvoir être effectivement déduits lors du calcul de la valeur vénale de la SCI. Le cas échéant, il conviendra selon nous de traiter leur montant euro par euro selon leur cause/origine respective.

Notons que des circonstances démontrant que le compte courant d’associé a été conclu antérieurement à l’entrée en vigueur de l’IFI ou à une date très antérieure à celle à compter de laquelle le foyer fiscal est devenu redevable de cet impôt peuvent être de nature à caractériser un objectif principalement autre que fiscal.

Location meublée de biens détenus en SARL

Selon l’article 965 du CGI, sont exonérés les biens et droits immobiliers affectés à l’activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale de la société qui les détient. La location de locaux d’habitation loués meublés peut constituer une activité commerciale éligible mais les conditions d’exonération dépendront alors du régime fiscal de la SARL (IS ou IR).

Pour rappel, l’activité de location meublée exercée dans le cadre d’une SCI entraînera son assujettissement automatique à l’IS (sauf tolérance -risquée- d’un montant de recettes retirées de la location meublée < 10% du total des recettes de la société). 

Incompatibilité de l’abattement légal sur la résidence principale

Le bénéfice de l’abattement légal de 30% sur la valeur vénale de la résidence principale du redevable est exclu lorsque l’immeuble est détenu par le biais d’une SCI. 

Bon à savoir

L’application de décotes notamment d’illiquidité et de minorité (de 10% à 20% chacune) reste possible dans le cadre de l’IFI.

Publication du décret n° 2018-1054 du 29 novembre 2018 : accélération du contentieux lié à l’éolien terrestre et amélioration de la phase d’instruction des autorisations environnementales

Publication du décret n° 2018-1054 du 29 novembre 2018 : accélération du contentieux lié à l’éolien terrestre et amélioration de la phase d’instruction des autorisations environnementales

Le décret n° 2018-1054 du 29 novembre 2018 relatif aux éoliennes terrestres, à l’autorisation environnementale et portant diverses dispositions de simplification et de clarification du droit de l’environnement offre un cadre réglementaire à certaines propositions formulées par le groupe de travail éolien, désigné il y a près d’un an par le ministère de la transition écologique et solidaire en vue d’accélérer le développement de la filière éolienne (cf. bulletin du 23/02/18). Outre les deux points majeurs que sont la compétence en premier et dernier ressort des cours administratives d’appel pour les autorisations administratives liées à l’éolien terrestre et la cristallisation automatique des moyens, ce décret vise à perfectionner la phase d’instruction des autorisations environnementales.

ACCÉLÉRATION DU CONTENTIEUX RELATIF À L’ÉOLIEN TERRESTRE

CAA compétentes en premier et dernier ressort 

Afin d’accélérer le traitement des recours introduits à l’encontre d’autorisations relatives aux installations de production d’électricité d’origine éolienne, les cours administratives d’appel seront compétentes2, en premier et dernier ressort, pour connaître des requêtes introduites à l’encontre :

-des autorisations administratives liées aux installations de parcs éoliens terrestres (autorisation environnementale ou unique, autorisation ICPE, dérogation à la législation des espèces protégées, autorisation de défrichement, autorisation d’occupation du domaine public, etc.1) ;

-des décisions de prorogation ou de transfert de ces autorisations ;

-des autorisations modificatives ou complétant les prescriptions initiales ;

-ou de leur refus.

La représentation par un avocat devient donc obligatoire.

Cristallisation automatique des moyens

Le décret du 29 novembre 2018 met en place la cristallisation automatique des moyens dans le contentieux relatif à l’éolien terrestre, à l’instar de celle récemment instaurée dans le contentieux de l’urbanisme par le décret du 17 juillet 2018 (cf. bulletin du 1/10/18).

Laissée, en principe, à la libre appréciation du juge (art. R. 611-7-1 CJA), la cristallisation des moyens est désormais automatique à l’issue d’un délai de 2 mois suivant la communication aux requérants du premier mémoire en défense.

La compétence de la CAA en premier et en dernier ressort ainsi que le mécanisme de cristallisation automatique des moyens sont applicables aux requêtes enregistrées à compter du 2 décembre 2018.

AMÉLIORATION DE LA PHASE D’INSTRUCTION DE L’AUTORISATION ENVIRONNEMENTALE

Une phase de décision plus diligente

Le décret prévoit également des mesures visant à accélérer la phase de délivrance de l’autorisation environnementale (art. 8 du décret et R. 181-41 c. env.) :

1) Il modifie la date à compter de laquelle le préfet dispose (sauf exceptions) d’un délai de deux mois pour rendre sa décision : ce délai court désormais à compter du jour de l’envoi, par le préfet, du rapport et des conclusions du commissaire enquêteur au pétitionnaire, et non plus à compter du jour de la réception de ces documents par le pétitionnaire.

2) Pour rappel, ce délai peut être prorogé d’un mois lorsque l’avis de la CDNPS ou du conseil départemental de l’environnement et des risques sanitaires et technologiques est sollicité (art. R. 181-39).

Le décret encadre mieux la possibilité de prorogation de ces délais, désormais expressément limitée à deux mois, sauf accord du pétitionnaire, et devant faire l’objet d’un arrêté motivé du préfet. 

Un contrôle redéfini pour les radars aériens ?

Le groupe de travail éolien avait préconisé de limiter la saisine de la DGAC, pour avis conforme, aux projets situés jusqu’à 16 km autour des radars civils et militaires.

Le décret (art. 6) semble pour l’heure incomplet s’agissant de la redéfinition du contrôle relatif aux radars aériens civils.

Il prévoit que le ministre chargé de l’aviation civile sera saisi pour avis conforme s’agissant des radars primaires, secondaires et radiophares omnidirectionnels très haute fréquence, sur la base de critères de distance et de hauteur fixés par un arrêté des ministres chargés des installations classées et de l’aviation civile.

Cet arrêté interministériel permettra d’affiner la lecture des nouvelles dispositions de l’article R. 181-32 du code de l’environnement, et, le cas échéant, de réduire les contraintes pesant sur le développement de la filière éolienne.

Quelques précisions

[1] Les autorisations concernées sont énumérées à l’article 23 du décret.

[2] La cour administrative d’appel territorialement compétente est celle dans le ressort de laquelle l’autorité décisionnaire a son siège.

Le décret allonge la période durant laquelle l’AE doit être publiée sur le site Internet de la préfecture qui a délivré l’acte, qui passe d’un mois à quatre mois minimum (art. R. 181-44 c. env.).

Abréviations

CJA : code de justice administrative

c. env. : code de l’environnement

CAA : cour administrative d’appel

ICPE : installation classée pour la protection de l’environnement

AE: autorisation environnementale

CDNPS : commission départementale de la nature, des paysages et des sites

DGAC : direction générale de l’aviation civile

L’extension de la réduction d’impôt Pinel pour favoriser la revitalisation des cœurs de ville (« amendement Denormandie ») amendée par le Sénat

L’extension de la réduction d’impôt Pinel pour favoriser la revitalisation des cœurs de ville (« amendement Denormandie ») amendée par le Sénat

Alors que le gouvernement proposait une simple extension du dispositif Pinel en faveur des travaux d’amélioration portant sur des immeubles de cœur de ville des villes moyennes, le Sénat s’est emparé de cette évolution afin de mieux l’adapter aux enjeux de revitalisation auxquels elle a vocation à répondre.
Tour d’horizon des amendements adoptés.

UN ELARGISSEMENT DES OPERATIONS ELIGIBLES 

Une extension territoriale du dispositif

Afin de tenir compte de la persistance de besoins locatifs au sein de communes situées sur le territoire de zones B2 -désormais exclues du dispositif Pinel-, une nouvelle possibilité d’éligibilité a été prévue, avec avis défavorable du gouvernement, au bénéfice de celles d’entre elles qui feraient état de besoins particuliers.

Celles-ci seraient rendues éligibles par décret mais seulement à hauteur d’un nombre limité -et donc connu d’avance- de logements, pris sur décision du Préfet après avis du comité régional de l’habitat et de l’hébergement mentionné à l’article L. 364-1 du CCH.

Seule une dizaine de villes seraient ici concernées, lesquelles s’ajouteraient à celles visées par l’amendement « Denormandie » initial qui, pour sa part, faisait référence aux 222 villes du plan « Action cœur de ville ».

Une extension aux opérations de transformation

S’il est normalement possible de bénéficier du dispositif Pinel dans le cadre d’opérations de transformation de locaux en logements, il résultait de la rédaction de l’article 199 novovicies que de telles opérations n’étaient éligibles que dans le cadre du champ d’application classique de ce dispositif (i.e. pour les immeubles situés sur le territoire de communes classées en zone A, Abis ou B1), à l’exclusion donc des immeubles situés sur le territoire de villes moyennes pour lesquelles l’amendement « Denormandie » ne permettait que des travaux de rénovation.

Les sénateurs ont, avec l’avis favorable du gouvernement, amendés cette rédaction afin de permettre l’éligibilité des opérations de transformation réalisées sur le territoire de villes moyennes « Denormandie » quand bien même elles seraient classées en zone B2 ou C.

UN ASSOUPLISSEMENT LIMITE DU DISPOSITIF APPLICABLE A CES OPERATIONS

Plus haut et plus fort ?

Uniquement pour les opérations concernées par cette extension du dispositif Pinel, le plafond de prix de revient des investissements éligibles serait porté de 300.000 € par contribuable et par même année d’imposition à 400.000 €.

Aussi, et toujours pour ces seules opérations, le taux de réduction d’impôt applicable serait pour sa part porté à 30% en cas d’engagement de location souscrit pour une durée de 12 ans (au lieu du taux maximal de 21% normalement applicable).

S’ils tendent évidemment à renforcer l’attractivité du dispositif au vu des besoins de redynamisation des territoires concernés, ces deux amendements ont toutefois été adoptés avec un avis défavorable tant de la commission des finances du Sénat que du gouvernement et ont donc de fortes chances d’être annulés par l’Assemblée Nationale (Cf. encadré).

Le plafond des niches fiscales inchangé

La réduction d’impôt Pinel est au nombre de celles concernées par le plafond global des niches fiscales fixé à 10.000 € / an, ce qui est une limite à la réalisation d’opération dès lors que la réduction d’impôt qui en résulterait serait au moins partiellement neutralisée par celui-ci.

Tant pour y remédier que pour permettre aux autres mesures adoptées de produire pleinement leurs effets (rehaussement du plafond de prix de revient à 400.000 € et du taux de RI à 30%), un amendement visant à soumettre ces opérations au plafond majoré de 18.000 € avait été initialement préparé avant d’être finalement retiré en séance à raison des avis défavorables notamment émis le gouvernement.

Une extension timorée ?

Nous vous renvoyons à la lecture de notre bulletin en date du 27 novembre 2018 pour comprendre en quoi le recours à une extension du dispositif Pinel est insuffisant pour satisfaire à l’ensemble des enjeux auxquels sont en proie les territoires concernés.

Bon à savoir

Un amendement adopté avec un avis défavorable du gouvernement permet de proroger de dix-huit mois le délai d’achèvement « Pinel » des logements acquis en VEFA sur « demande motivée par les caractéristiques particulières de la situation rencontrée et notamment l’importance et la nature du projet de construc-tion » du maître d’ouvrage. Ce délai, qui n’est pas propre aux opérations « Denormandie », est actuellement de trente mois fixes à compter de la signature de l’acte d’acquisition.

Et maintenant ?

Ces modifications apportées par le Sénat feront l’objet d’une relecture par l’Assemblée Nationale dans les jours à venir, laquelle pourrait les adopter en l’état, les modifier ou tout simplement les rejeter.

Les conséquences de la loi ELAN sur les règles de la commande publique

Les conséquences de la loi ELAN sur les règles de la commande publique

La loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dite « ELAN », emporte de très nombreuses modifications pour les acteurs publics et privés de l’immobilier. Si le droit de la commande publique n’est certainement pas la matière ayant subi le plus de changements, la loi « ELAN » y apporte cependant certaines nouveautés d’ampleur, s’agissant notamment des règles propres à la maîtrise d’ouvrage publique. D’autres novations relatives à la procédure même de passation des marchés publics, bien que moins structurelles, s’imposent désormais aux acheteurs publics et opérateurs économiques.

I. RESTRICTIONS DU CHAMP D’APPLICATION DE LA LOI MOP

Net recul de la maîtrise d’ouvrage publique

Se prévalant de l’objectif, devenu un poncif, de maîtrise des coûts que ne permettrait pas la loi « MOP » du 12 juillet 1985, des modifications notables ont été apportées à celle-ci.

En premier lieu, la réalisation des ouvrages d’infrastructures situés dans le périmètre d’une opération d’intérêt national (OIN) ou d’une grande opération d’urbanisme (GOU) au sens de l’article L.  312-2 du code de l’urbanisme, ne sera plus soumise obligatoirement à la maîtrise d’ouvrage publique de ces travaux.

En second lieu, si les OPHLM demeurent soumis au titre premier* de la loi de 1985 précisant les obligations du maître d’ouvrage public, ils se voient désormais dispensés du respect du titre deuxième* concernant la mission de maîtrise d’œuvre confiée à une personne privée.

L’extension du marché de conception-réalisation

Si les organismes d’HLM, ainsi que les SEM en produisant, pouvaient déjà recourir aux marchés de conception-réalisation sans avoir à le justifier par des motifs d’ordre technique ou tenant à l’amélioration de l’efficacité énergétique, cette exception ne devait être que temporaire. Il est désormais prévu que cette exception perdurera après le  31 décembre 2021.
En revanche, les CROUS pourront, quant à eux, y recourir seulement jusqu’à cette date butoir.

Surtout, l’article 69 de la loi « ELAN » crée une nouvelle possibilité d’avoir recours à ces marchés, et ce, quelle que soit la qualité du pouvoir adjudicateur, pour assurer la construction d’un bâtiment neuf plus vertueux que la réglementation thermique en vigueur. En cette hypothèse, des motifs d’ordre technique ou tenant à l’amélioration de l’efficacité énergétique devront cependant être démontrés.

II. MODIFICATION DES REGLES PROCEDURALES DE PASSATION DES MARCHES PUBLICS

L’abandon de l’obligation de recourir à la procédure de concours

L’article 88 supprime l’obligation de recourir à la procédure de concours pour la passation des marchés publics de maîtrise d’œuvre des organismes d’habitations à loyer modéré, des SEM de construction et gestion de logements sociaux agréées, ainsi que des CROUS.

Toutefois, la publication de l’ordonnance n° 2018-1074 portant partie législative du code de la commande publique (CCP) semble déjà remettre en cause cette évolution. En effet, le futur article L. 2172-1 de ce code généralise l’obligation de concours, sans qu’aucune exception ne soit prévue au profit des organismes publics et privés d’habitation à loyer modéré (Cf. art. L. 2411-1, CCP).

Les semaines à venir nous diront s’il s’agit d’une erreur de codification, ou si le gouvernement n’entend en réalité faire profiter les organismes d’HLM de cette exception que jusqu’au 1er avril 2019 (date d’entrée en vigueur du CPP).

Clarification des règles applicables aux commissions d’appels d’offres

Le CGCT se voit modifié pour poser le principe selon lequel seuls les marchés publics passés selon une procédure formalisée et dont la valeur est supérieure aux seuils imposant le recours à cette procédure doivent être attribués après la réunion d’une commission d’appel d’offre (art. L. 1414-2 CGCT). Cela met fin à l’incertitude sur le point de savoir si la seule valeur du marché suffit, ou non, pour imposer l’intervention de ces commissions d’appel d’offres.

Dans le même temps, le législateur unifie le régime des commissions d’appel d’offres des organismes publics et privés d’habitations à loyer modéré, en soumettant les premiers aux dispositions du CCH (Cf. article R. 433-6).

Ces nouvelles dispositions sont applicables à l’ensemble des marchés dont la procédure a été lancée postérieurement au 24 novembre 2018.

À noter

L’article 69 de la loi « ELAN » crée également une nouvelle hypothèse de recours au marché de conception-réalisation, uniquement jusqu’au 31 décembre 2022, en vue de l’établissement d’infrastructures et de réseaux de communications électroniques, et ce, sans devoir justifier des motifs classiquement exigés.

* Pour rappel, le titre I de la loi « MOP » pose les missions de la maîtrise d’ouvrage publique que les OPHLM devront toujours respecter, à savoir, s’assurer notamment de la faisabilité de l’opération, déterminer la localisation ou encore d’en assurer le financement.
Quant au titre II auquel ils ne seront plus soumis, celui-ci impose de recourir à une équipe pluridiscipli-naire unique, une mission de base à confier au maître d’œuvre (de la conception à l’extinction de la garantie de parfait achèvement), ou encore au principe de la rémunération forfaitaire.

Annulation juridictionnelle d’un refus de permis de construire : le Conseil d’Etat consacre l’obligation pour l’administration de délivrer l’autorisation d’urbanisme sollicitée

Annulation juridictionnelle d’un refus de permis de construire : le Conseil d’Etat consacre l’obligation pour l’administration de délivrer l’autorisation d’urbanisme sollicitée

Par un avis du 25 mai 2018, le Conseil d’Etat a consacré l’obligation, pour le juge administratif faisant droit à une demande d’annulation d’un refus de permis de construire ou de décision d’opposition à déclaration préalable, d’enjoindre à l’administration de délivrer l’autorisation d’urbanisme qu’elle avait illégalement refusée. Le juge administratif ne pourra plus, en principe, se contenter d’enjoindre à l’administration de réinstruire la demande d’autorisation sollicitée. Dans cet avis, les juges du Palais Royal se fondent, tout en précisant leur portée relative, sur les dispositions introduites par la loi n°2015-990 du 6 août 2015 dite « Loi Macron » qui obligent, conformément à l’article L. 424-3 du code de l’urbanisme, d’indiquer l’intégralité des motifs justifiant la décision de refus de permis de construire – CE, 25 mai 2018, req. no 417350

I. L’OBLIGATION POUR LE JUGE D’ENJOINDRE DE DÉLIVRER L’AUTORISATION D’URBANISME

L’annulation juridictionnelle du refus entraîne la délivrance de la demande d’autorisation…

Désormais,  lorsque le juge administratif annule un refus d’autorisation ou une opposition à une déclaration, celui-ci doit (à condition, bien sûr, d’être saisi de conclusions à fin d’injonction) ordonner à l’autorité compétente de délivrer l’autorisation ou de prendre une décision de non-opposition1.

Cette injonction n’interviendra qu’après que le juge administratif aura censuré l’ensemble des motifs que l’autorité compétente a énoncés dans sa décision et, le cas échéant, les motifs énoncés par elle en cours d’instance2.

Le juge administratif se fonde sur une combinaison des  articles L. 911-1 du C.J.AL. 600-2L. 424-1, et L. 424-3 du C.U., le tout à la lumière des travaux parlementaires révélant l’objectif d’accélé-ration de la mise en œuvre de projets conformes aux règles d’urbanisme applicables.

….hormis dans deux hypothèses

Le Conseil d’Etat relève deux hypothèses faisant obstacle à la délivrance de l’autorisation sollicitée, précisant ainsi le caractère relatif de la loi sus-évoquée :

– en premier lieu, lorsqu’il résulte de l’instruction que les dispositions en vigueur à la date de la décision annulée interdisent de l’accueillir pour un motif que l’administration n’a pas relevé ;

– en deuxième lieu, si, par suite d’un changement de circonstances, la situation de fait existant à la date du jugement y fait obstacle.

Ces exceptions peuvent amener le juge de l’injonction, dans les dossiers où il estimerait que les parties ne lui ont pas apporté  suffisamment d’éléments d’analyse, à  s’assurer que rien ne s’oppose à la délivrance de l’autorisation sollicitée, le cas échéant par des mesures d’instruction appropriées.

II. LES CONSEQUENCES DE CETTE INJONCTION 

Les conclusions aux fins d’injonction de délivrer l’autorisation valent confirmation de la demande du pétitionnaire

Enfin, et fort logiquement,  le Conseil d’Etat indique que les conclusions sollicitant une injonction en vue de voir délivrer l’autorisation d’urbanisme initialement refusée (ou de ne pas s’opposer à la déclaration préalable) valent confirma-tion de sa demande par le pétitionnaire (telle que prévue par les dispositions de l’article L. 600-2 du code de l’urbanisme.

Ce principe avait déjà été consacré par le Conseil d’Etat dans un arrêt du 23 février 2017 (n°395274) à propos des décisions juridictionnelles enjoignant à l’administration de réexaminer la demande d’autorisation.

La délivrance d’un permis de construire « provisoire » susceptible de retrait

Si une nouvelle décision juridictionnelle (appel ou pourvoi en cassation) annule la décision par laquelle le juge administratif a enjoint à l’administration de délivrer l’autorisation d’urbanisme sollicitée, le Conseil d’Etat prévoit que l’administration pourra -en général, du moins3- procéder au retrait du permis de construire provisoirement délivré dans un délai maximum de trois mois à compter de la notification à l’administration de la décision juridictionnelle.

Ce retrait devra faire l’objet d’une procédure contradictoire.

Attention au recours des tiers !

Attention, le juge administratif rappelle que l’autorisation d’occuper ou utiliser le sol délivrée dans ces conditions pourra être contestée par les tiers, sans qu’ils puissent se voir opposer les termes du jugement ou de l’arrêt.

Nota Bene

1 Aucune jurisprudence n’a pour l’instant confirmé l’éventuelle application de ce principe aux décisions de sursis à statuer.

2 Par cette précision, le Conseil d’Etat confirme la possibilité, pour l’administration, de proposer une substitution de motifs en cours d’instance (jurisprudence « Hallal » du 6 février 2004, n° 240560).

3 Le Conseil d’Etat réserve en effet le cas où les motifs de la décision infirmant la solution initiale feraient « par eux-mêmes obstacle à un nouveau refus de cette autorisation ».

Décision de sursis à statuer illégale : seule la preuve du caractère direct et certain du préjudice de non-réalisation du projet immobilier permet au pétitionnaire d’obtenir réparation du manque à gagner

Décision de sursis à statuer illégale : seule la preuve du caractère direct et certain du préjudice de non-réalisation du projet immobilier permet au pétitionnaire d’obtenir réparation du manque à gagner

Saisie d’une demande indemnitaire tendant à obtenir réparation du préjudice résultant de la perte de bénéfices liée à l’impossibilité de réaliser une opération immobilière à la suite d’une décision de sursis à statuer illégale, la cour administrative de Bordeaux, dans un arrêt du 15 novembre 2018, fait application du principe jurisprudentiel établi par le Conseil d’Etat dans sa décision du 15 avril 2016 «Commune de Longueville » (n° 371274) selon lequel seules des « circonstances particulières » permettent au pétitionnaire d’obtenir réparation. Cet arrêt offre l’occasion de revenir sur les conditions permettant à un pétitionnaire, s’estimant victime d’une décision d’urbanisme illégale, d’obtenir l’indemnisation de ses préjudices – C.A.A. Bordeaux, 15 novembre 2018, n°16BX02386

I. UNE DECISION ADMINISTRATIVE ILLEGALE ENGAGE LA RESPONSABILITE DE LA COLLECTIVITE

Une décision administrative illégale engage la responsabilité de la collectivité

Faisant application d’un principe jurisprudentiel constant du droit administratif établi de longue date par le Conseil d’Etat (cf.  CE, Sect.,  26 janvier 1973, Ville de Paris c/ Driancourtn°84768), la cour administrative d’appel de Bordeaux rappelle, s’agissant d’une décision de sursis à statuer illégale opposée à une demande de permis de construire trois logements, que :

« cette illégalité constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la commune (…) »

Ce principe jurisprudentiel est, bien sûr, également applicable dans l’hypothèse d’un refus de permis de construire illégal (CE, 15 avril 2016, n° 371274).

Les frais de conception et d’élaboration peuvent donner lieu à indemnisation

S’il n’a pas obtenu ultérieurement le permis de construire, le pétitionnaire a droit à l’indemnisation des frais exposés pour la réalisation du projet en cause, dès lors qu’est démontré un préjudice direct et certain.

La jurisprudence a déjà admis l’indemnisation :

–  des frais d’architectes à hauteur de 29 900 € (et ce, alors même que les factures avaient été établies un an après la décision de refus de permis de construire illégale) (C.A.A. Nantes,14 juin 2013, n° 11NT02135) ;

– des frais de géomètres (C.A.A. Marseille, 9 février 2012, n° 10MA01181) ;

– des frais financiers à hauteur de 150 000 € qu’aurait pu percevoir le pétitionnaire en procédant au placement bancaire, pendant 5 ans d’une somme de 2 197 800 € liée à la vente des logements (C.A.A. Marseille, 10 juillet 2018, n°  16MA02556)

II. LA RÉPARATION AU TITRE DU MANQUE A GAGNER EST CONDITIONNÉE PAR LA PREUVE CONCRETE D’ENGAGEMENTS SOUSCRITS OU DE L’ETAT AVANCÉ DE NÉGOCIATIONS

Le manque à gagner est indemnisé dans l’hypothèse de « circonstances particulières »

La C.A.A. de Bordeaux rappelle dans son arrêt du 15 novembre 2018 que la perte de bénéfices ou le manque à gagner « revêt un caractère éventuel et ne peut, en principe, ouvrir droit à réparation ». Ainsi, la seule perte de chance de réaliser une opération immobilière n’est pas suffisante, en elle-même, pour permettre la réparation d’un tel préjudice.

Cependant, le juge administratif réserve une exception à ce principe et admet que, dans l’hypothèse de circonstances particulières, telles que des engagements souscrits par de futurs acquéreurs ou l’état avancé des négociations commerciales avec ces derniers, le pétitionnaire soit en droit d’obtenir réparation au titre du bénéfice qu’il pouvait raisonnablement attendre de cette opération.

Seule la preuve du caractère direct et certain du préjudice permet d’obtenir réparation

Le juge administratif reste cependant particulièrement exigeant quant à la preuve  du caractère direct et certain du préjudice résultant du manque à gagner invoqué par les pétitionnaires. 

Ainsi, en l’espèce, et alors même que la société requérante se prévalait de la conclusion de contrats de réservation, le juge a rejeté les demandes indemnitaires dès lors qu’il n’avait pas été démontré que :

-le délai particulièrement long mis à entamer les travaux aurait été en lien direct avec l’illégalité de la décision de sursis à statuer ;

-les conditions suspensives d’obtention d’un prêt auraient été réalisées.

Un principe transposable aux lotissements

Ce principe est également applicable aux refus illégaux de permis d’aménager ou de décision d’opposition à déclaration préalable de division (en ce sens, voir notamment : CE, 12 juillet 2017, n° 394941).

Le juge administratif est ici d’autant plus réticent à admettre la réparation du préjudice du pétitionnaire au titre du manque à gagner que le titulaire d’un permis d’aménager ne bénéficie pas d’un droit acquis à la délivrance du permis de construire sur le périmètre du lotissement (CE, 3 février 2016, n°  374695).

Abrévations

C.A.A. : Cour Administrative d’Appel

CE : Conseil d’Etat