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Rapport « Maugüé » : les contours d’une future grande réforme du contentieux des autorisations d’urbanisme (permis de construire, etc.) ?

Rapport « Maugüé » : les contours d’une future grande réforme du contentieux des autorisations d’urbanisme (permis de construire, etc.) ?

Dans le sillage des nombreuses réformes des vingt dernières années en contentieux de l’urbanisme, le rapport « Maugüé » rendu il y a quelques semaines propose plusieurs mesures afin de rendre le contentieux des autorisations d’urbanisme moins incertain et surtout moins pénalisant pour les porteurs de projets de construction.

Ce rapport, qui s’articule autour de quatre chapitres dont les mesures phares sont résumées ci-après, a été largement intégré dans le projet de loi « ELAN ». 

LIMITER LES SOURCES D’INSÉCURITÉ POUR LE BÉNÉFICIAIRE D’UNE AUTORISATION D’URBANISME CONTESTÉE

Réduire les délais de jugement des recours contre les autorisations

Actuellement, le délai moyen de jugement d’un recours contre un permis de construire est de 23 mois en première instance.

Or, bien que qu’un recours ne soit pas suspensif, son existence paralyse en pratique l’opération projetée jusqu’au jugement (refus de financement bancaire lié à l’absence de caractère définitif d’un permis, etc.).

Le Rapport propose, pour les recours au fond, d’instituer un délai de cristallisation automatique des moyens et d’enserrer le référé suspension dans ce nouveau délai 

  – aucun moyen nouveau ne pourra être invoqué à l’issue des deux mois suivant la communication aux parties du premier mémoire en défense ;

– un référé suspension ne pourra plus être introduit à l’expiration de ces deux mois.

Sanctionner plus efficacement les recours abusifs 

Alors que l’article L. 600-7 du code de l’urbanisme1 permet de former des conclusions indemnitaires à l’occasion d’un recours abusif contre un permis, seuls trois applications positives en ont été relevées à ce jour.

Le Rapport propose de : 

– supprimer la condition de « préjudice excessif » actuellement exigée ; 

– remplacer la notion de « conditions excédant la défense des intérêts légitimes » par celle de « conditions qui traduisent un comportement déloyal de la part du requérant ». 

Cette notion apparaît plus proche de celles de loyauté ou de bonne foi utilisées dans d’autres contentieux2, ce qui, à notre sens, permettra au juge administratif d’opérer des parallèles avec les logiques qu’il y applique.

RENFORCER LA STABILITÉ DES AUTORISATIONS DÉLIVRÉES ET DES CONSTRUCTIONS ACHEVÉES

Consolider les autorisations d’urbanisme existantes

Afin de permettre au bénéficiaire d’un permis de disposer d’informations fiables s’agissant des contestations portant sur l’autorisation qui lui a été accordée, le Rapport invite le législateur à :

1) Obliger le requérant à notifier tout recours (art. R. 600-1 CUcontre « l’ensemble des décisions relatives à l’occupation ou l’utilisation du sol » (exceptés les certificats d’urbanisme), comprenant ainsi les décisions de refus de : 

– retirer ou abroger une autorisation d’urbanisme ; 

– en constater la caducité.

2) Donner une base légale à la délivrance, par les juridictions, d’attestations portant sur :

– l’absence de recours contentieux, d’appel ou de pourvoi concernant une autorisation, déterminant le caractère définitif ou non de l’autorisation ; 

– ou, le cas échéant, la date du recours.

Accroître la stabilité juridique des constructions achevées

En l’état du droit, les constructions achevées sont exposées à deux risques contentieux principaux :

– action en annulation du permis pendant un an à compter de l’achèvement de la construction ; 

– action en démolition, dans les zones limitativement prévues par l’article L. 480-13 CU3.

Afin de renforcer la pérennité des constructions achevées, le Rapport propose de limiter à six mois (au lieu d’un an) le délai de contestation de ces constructions.

Il envisage toutefois, de façon plus discutable compte tenu de l’impératif de sécurité juridique, l’instauration d’un droit spécifique conféré au préfet pour « solliciter la démolition d’une construction en dehors des zones mentionnées par [l’article L. 480-13 du code de l’urbanisme] ».

À noter

L’objectif de réduction de l’incertitude juridique et de prévention des recours abusifs susceptibles de décourager les investissements est d’intérêt général (CC QPC n° 2017-672 du 10 novembre 2017).

Introduit par l’ordonnance no 2013-638 du 18 juillet 2013 relative au contentieux de l’urbanisme.

Par exemple, l’exigence de loyauté dans les relations contractuelles a été consacrée en droit des contrats publics, (CE, Ass., 28/12/2009, no 304802 ; CE, Sect., 21/03/2011, no 304806).

Par exemple : bande littorale des 100 mètres ; sites patrimoniaux remarquables ; espaces, paysages et milieux caractéristiques du patrimoine naturel et culturel montagnard, etc

Abréviations

CU : code de l’urbanisme