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Les prescriptions grevant les autorisations d’urbanisme sont contestables

Les prescriptions grevant les autorisations d’urbanisme sont contestables

L’ADMINISTRATION NE PEUT ASSORTIR UNE AUTORISATION D’URBANISME DE PRESCRIPTIONS QUE SOUS CERTAINES CONDITIONS

Le fondement du pouvoir de prescription

Les autorisations d’urbanisme (PC, DP, etc.) peuvent être assorties de prescriptions motivées*1 par lesquelles l’autorité compétente impose au pétitionnaire diverses obligations visant à garantir la conformité de son projet aux règles d’urbanisme (ex. : création de places de stationnement ; de voies d’accès plus appropriées en termes de sécurité incendie ; etc.).

Le cadre de cette prérogative des services instructeurs est fixé par l’article L. 421-6 du code de l’urbanisme qui dispose que :

« Le permis de construire ou d’aménager ne peut être accordé que si les travaux projetés sont conformes aux dispositions législatives et réglementaires relatives à l’utilisation des sols (…) »*2.

Des prescriptions précises et limitées

Les prescriptions ne doivent entraîner que des modifications sur des points précis et limités et ne nécessitant pas la présentation d’un nouveau projet (CE, 13/03/2015, req. n° 358677).

La Cour administrative d’appel de Nantes est venue préciser qu’un maire ne pouvait pas délivrer un permis de construire en l’assortissant de prescriptions imprécises, en renvoyant à une concertation ou à une instruction complémentaire ultérieures (CAA Nantes, 30 janvier 2015, req. n° 14NT01065).

Ainsi, un soin particulier doit être apporté à la rédaction des prescriptions sous peine d’entacher l’autorisation d’urbanisme d’illégalité.

LE TITULAIRE D’UNE AUTORISATION D’URBANISME EST RECEVABLE A DEMANDER L’ANNULATION D’UNE OU DE PLUSIEURS PRESCRIPTIONS LA GREVANT

La recevabilité de la demande d’annulation

Selon l’arrêt du Conseil d’Etat du 13 mars 2015, « le titulaire d’une autorisation d’urbanisme est recevable à demander l’annulation d’une ou de plusieurs prescriptions dont celle-ci est assortie ».

Cependant, les prescriptions illégales ne pourront faire l’objet d’une annulation partielle que s’il résulte de l’instruction qu’une telle annulation n’est pas susceptible de remettre en cause la légalité de l’autorisation d’urbanisme et qu’ainsi, ces prescriptions ne forment pas avec elle un ensemble indivisible.

Il faut donc que la demande de « correction » de l’autorisation ne fasse pas apparaître un vice global affectant celle-ci.

L’absence de notification obligatoire

Selon l’article R. 600-1 du code de l’urbanisme, en cas de recours contentieux à l’encontre d’une autorisation d’urbanisme, l’auteur du recours est tenu de le notifier à l’auteur de la décision et au titulaire de l’autorisation.

Cependant, le Conseil d’Etat est venu opportunément préciser à travers l’arrêt du 13 mars 2015 que cet article « n’exige pas que le bénéficiaire d’une autorisation d’urbanisme notifie à l’auteur de cette décision le recours contentieux qu’il forme pour la contester lorsqu’elle est assortie de prescriptions ou pour contester ces prescriptions elles-mêmes ».

*1 Selon l’article L. 424-3 du code de l’urbanisme : « Lorsque la décision rejette la demande ou s’oppose à la déclaration préalable, elle doit être motivée. Il en est de même lorsqu’elle est assortie de prescriptions, oppose un sursis à statuer ou comporte une dérogation ou une adaptation mineure aux règles d’urbanisme applicables ».

*2 L’arrêt du Conseil d’Etat du 13 mars 2015 reprend cet article dans son considérant n° 3.

A noter :

  • Jusqu’à la décision du Conseil d’Etat du 13 mars 2015, le bénéficiaire de l’autorisation ne pouvait demander l’annulation de ces prescriptions. En effet, ces dernières étaient considérées comme indivisibles de l’autorisation (CE, 12/10/1962, req. n° 55655, Ministre de la construction c/ Compagnie immobilière de la région parisienne)
  • Néanmoins, les prescriptions financières (CE, 13/11/1981, Plunian, n° 16504) ainsi que les cessions de terrains pouvaient déjà être contestées (CE, 8/02/1985, Raballand, n° 40184).

Les autorisations d’occupation du sol (AOS) tacites doivent être soumises à un contrôle de légalité au même titre que celles délivrées de manière expresse.

Les autorisations d’occupation du sol (AOS) tacites doivent être soumises à un contrôle de légalité au même titre que celles délivrées de manière expresse.

LA DISSOCIATION ENTRE TRANSFERT ET CARACTERE EXECUTOIRE

Les AOS tacites doivent être obligatoirement transmises au préfet

L’article L. 2131-2 du code général des collectivités territoriales (C.G.C.T.) énumère précisément les actes soumis aux exigences de publicité et de transmission au préfet, parmi lesquels figure « le permis de construire et les autres autorisations d’utilisation du sol (…) ».

Le Conseil d’État a jugé que, compte tenu de leur nature, les AOS tacites ont l’obligation d’être transmises au préfet afin qu’il en contrôle leur légalité. Leur formation implicite ne peut avoir pour conséquence de les soustraire à cette obligation de transmission.

Le caractère exécutoire des AOS tacites reste pourtant indépendant de toute transmission au préfet

Le Conseil d’État, en reprenant les termes de l’article L. 424-8 du code de l’urbanisme (C.U.), souligne qu’une AOS tacite est exécutoire dès qu’elle est acquise « sans qu’il y ait lieu de rechercher si elle a été transmise au représentant de l’Etat dans le département ou à son délégué dans l’arrondissement ».

En conséquence, il prévoit pour les AOS tacites un régime dérogatoire à celui prévu par l’article L. 2131-1 du C.G.C.T. disposant qu’en temps normal, le caractère exécutoire des AOS expresses dépend de leur transmission au préfet.

LES MODALITES PARTICULIERES DU CONTROLE DE LEGALITE DU PREFET SUR LES AOS TACITES

La distinction avec le régime des décisions expresses

L’absence de matérialité des AOS tacites ne permet pas aux autorités administratives de les communiquer au préfet sous quinze jours à compter de leur signature (article L. 2131-1 C.G.C.T.).

Ainsi, et d’après le Conseil d’État, une commune doit être réputée comme ayant satisfait à l’obligation de transmission lorsqu’elle adresse au préfet le dossier complet de demande d’autorisation dans la semaine suivant son dépôt (article R. 423-7 du C.U.).

En effet, le service en charge du contrôle de légalité a connaissance des délais d’instruction des AOS et sera, en principe, dans la capacité de déterminer la date de délivrance de l’autorisation tacite (articles R. 423-23 et R. 424-1 du C.U.).

La sécurité juridique des projets de construction compromise par l’écoulement d’un troisième délai

Comme pour les AOS expresses, le préfet a deux mois, à compter de la délivrance de l’AOS tacite, pour exercer son contrôle de légalité, ce qui assure au pétitionnaire une sécurité juridique, en principe, similaire.

Toutefois, celle-ci pourrait être compromise dans l’hypothèse où le dossier communiqué au préfet est incomplet ou si celui-ci est transmis postérieurement à la délivrance de l’AOS tacite (CE, 17 déc. 2014, req n°373681).

Une AOS illégale acquise tacitement par un pétitionnaire pourra alors être annulée par le juge administratif saisi par déféré préfectoral, alors même que l’AOS est purgée des délais de recours des tiers et du droit de retrait de l’autorité l’ayant délivré.

Rappels :

Depuis la loi du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions, le préfet dispose d’un pouvoir de contrôle de légalité des actes administratifs émis par les collectivités locales.

Pour cela, le préfet dispose de la faculté :

  • soit de saisir l’autorité administrative d’un recours gracieux tendant à la correction de
  • l’acte ou à son retrait (CE, 16 mai 1984, Cne de Vigneux sur Seine, req n°19816). Le cas échéant, si la collectivité ne fait pas droit à la demande du préfet, ce dernier pourra déférer l’acte devant le juge (CE, 18 avr. 1986, req n°62470) ;
  • soit de déférer directement l’acte estimé illégal devant le juge en vue de son annulation comme prévu par l’article L. 2131-6 du C.G.C.T.

À noter :

Chaque année, environ 1000 déférés préfectoraux sont effectués devant les juridictions administratives (soit pour chaque préfet : deux déférés/mois). Cela représente 0,020% des actes administratifs qui lui sont transmis.

En comparaison, 180 000 recours gracieux par an sont effectués auprès des autorités administratives par les préfets, soit environ 3,6% des actes qui lui sont transmis.

Dette fiscale au passif de l’ISF : un redressement fiscal permet-il de payer moins d’ISF?

Dette fiscale au passif de l’ISF : un redressement fiscal permet-il de payer moins d’ISF?

LA DETERMINATION D’UNE DETTE FISCALE CERTAINE DANS SON PRINCIPE

Une dette fiscale est déductible de l’ISF mais pas avant d’être devenue certaine

Rappelons que pour l’ISF 2015 sont susceptibles d’être déduites de l’actif au 1er janvier 2015 les dettes fiscales telles que l’IR et les prélèvements sociaux sur les revenus 2014, la taxe d’habitation ou les impôts fonciers 2015 (bien que les avis ne soient pas encore émis, il s’agit de dettes certaines à déduire sur la base du montant évalué, montant qui devra être régularisé lors de la prochaine déclaration ISF), et l’ISF théorique luimême dû au 1er janvier 2015.

Les dettes fiscales nées à la suite d’une procédure de contrôle sont également déductibles à la condition qu’elles soient devenues certaines.

Tant qu’une dette fiscale demeure litigieuse, elle ne peut pas être considérée comme certaine (Cass. Com. 13 janvier 1998, n°96-10352).

Attention, si vous avez déduit une dette fiscale encore litigieuse, vous êtes susceptible de faire l’objet de rectification au titre de votre ISF indûment minoré. 

CONSEQUENCES SUR LA DEDUCTION DE LA DETTE 

Une prise en compte rétroactive dès que la dette est devenue certaine 

La dette fiscale est considérée comme certaine dans son principe et donc déductible de l’assiette de l’ISF:

  • Si le contribuable ne conteste pas : c’est-à-dire s’il accepte les rehaussements d’impôt ;
  • SI le contribuable a contesté mais le litige est terminé: c’est-à-dire si une décision de justice est devenue définitive car rendue en dernier ressort ou bien si les délais d’appel sont expirés.

La jurisprudence est venue préciser qu’une dette fiscale devenue certaine l’est, rétroactivement, à compter du fait générateur de l’impôt redressé (i.e. l’encaissement des revenus, la date de cession pour la plus-value etc.) et non à compter de l’émission de l’avis d’imposition complémentaire.

Cette dette peut donc être déduite rétroactivement au passif de l’ISF calculé à compter du 1er janvier de l’année suivant celle du fait générateur (Cass. Com. 06 octobre 1998, n°96-20849) (Cf. exemple). 

Exemple

A la suite d’un contrôle fiscal en 2014, un contribuable est rectifié sur une plus-value de cession de valeurs mobilières réalisée en 2012. Il décide, en 2014, de ne pas contester ces rectifications.

Le contribuable peut prendre en compte cette dette d’impôt devenue certaine (absence de contestation) pour la détermination de son ISF 2013 dès lors que le fait générateur est de 2012 (date de la cession).

Il conviendra en pratique de procéder à une réclamation contentieuse pour obtenir le remboursement de l’excédent d’ISF 2013 précédemment acquitté puis de l’ISF 2014 modifié également et ce, jusqu’à l’ISF 2015 (ISF dû au titre de l’année de paiement de la dette fiscale).

Projet de loi de finances pour 2020 : vers la fin du « Malraux » en 2023 ?

Projet de loi de finances pour 2020 : vers la fin du « Malraux » en 2023 ?

Le projet de loi de finances initial ne comprenait aucune modification du dispositif « Malraux ».

Pourtant, le gouvernement a déposé un amendement qui a été adopté par la commission des finances de l’Assemblée nationale visant à mettre fin au dispositif à compter du 31 décembre 2023

UNE ATTEINTE GRAVE AU DISPOSITIF « MALRAUX », ISSUE D’UNE INITIATIVE BROUILLONNE 

Le dispositif Malraux, permet d’obtenir une réduction d’impôt, au titre des dépenses de restauration des immeubles situés dans les sites patrimoniaux remarquables (SPR), ex-secteurs sauvegardés, les quartiers anciens dégradés (QAD) et les quartiers conventionnés NPNRU. 

Le dispositif s’étale dans le temps : les dépenses, plafonnées à 400.000€ sont éligibles jusqu’au 31 décembre de la troisième année qui suit l’obtention de l’autorisation d’urbanisme. 

Pourtant, le gouvernement a déposé un amendement visant à supprimer le dispositif Malraux à compter du 31 décembre 2020. 

Cet amendement, obérait nécessairement et rétroactivement les opérations de restauration en cours, a néanmoins été adopté en l’état par la commission des finances le 7 octobre 2019. 

Cependant, compte tenu des évidentes objections levées par certains, le gouvernement a de lui-même rectifié son amendement, en reportant le délai à 2023, et l’a à nouveau fait adopter par la commission des finances le 9 octobre 2019. 

Ce revirement furtif et cafouilleux traduit un manque d’évaluation des conséquences et fait douter de la qualité d’analyse qui a été faite de la question. 

Cet amendement doit désormais suivre le circuit législatif pour entrer en vigueur. 

UNE INITIATIVE EN CONTRADICTION AVEC LA POLITIQUE DU GOUVERNEMENT

Le gouvernement affiche une politique forte de redynamisation des coeurs de ville. 

Cette politique était clairement affichée dans la loi ELAN et dans la loi de finances 2018 avec la mise en place du dispositif Denormandie

Une instruction du gouvernement datée du 29 juillet 2019 adressée aux préfets de régions et de départements leur demandait expressément de «participer activement à la réhabilitation du bâti existant» pour endiguer le phénomène de l‘étalement urbain qui s‘accompagne « d‘une paupérisation des centres-villes, (…), voire d‘une dégradation du patrimoine bâti ».

Or, aucun autre dispositif ne peut se vanter d‘avoir à son actif des résultats aussi remarquables que la loi Malraux. Sans le dispositif Malraux de nombreux coeurs de villes auraient à ce jour perdu tout caractère et seraient en déshérence. 

La suppression du dispositif Malraux est donc en contradiction avec ces objectifs.

De manière « politique », cet amendement est présenté comme un mécanisme d‘évaluation. Dans ce cas, il paraît anormal d’avoir décidé de la fin du dispositif et non organisé un procédé d’évaluation.

CONCLUSION PROVISOIRE

Cet amendement devant suivre le circuit législatif, nous pouvons supposer qu’au cours de ce processus une analyse plus sérieuse conduise à sa suppression. 

Néanmoins, cette année pourrait être la dernière pour bénéficier du dispositif Malraux sur une période de 4 ans. La situation est d’autant plus contraignante pour les opérations réalisées en vente d’immeubles à rénover pour lesquelles le paiement des travaux ne peut se faire que conformément à l’avancement des travaux. 

Evolution du régime

Le régime « Malraux » n’était que l’application du principe fiscal de base selon lequel les déficits s’imputent sur le revenu catégoriel correspondant puis sur le revenu global au-delà.

La décision prise en 2009 d’en faire une réduction d’impôt, dispositif exceptionnel, l’a précarisé. 

Depuis, le taux de la réduction d’impôt a subi deux rabots et elle risque maintenant de disparaître.

Dans les QAD et quartiers conventionnés NPNRU la réduction d’impôt ne s’applique déjà plus qu’aux dépenses effectuées jusqu’au 31 décembre 2019.

Peut-on abuser du démembrement ?

Peut-on abuser du démembrement ?

Les faits

Les faits de l’affaire portée devant le Comité pourraient se résumer comme suit :

  • En 2000, une SCI IR acquiert un immeuble donné en location ;
  • En 2005, une société IS est constituée par les mêmes associés que la SCI ;
  • Suite à cette constitution, les associés apportent l’usufruit temporaire de la totalité des parts de la SCI IR à la société IS.

Les bénéfices escomptés

L’objectif du montage réside dans le cumul des avantages de la fiscalité IS (outre amortissement du droit d’usufruit temporaire au sein de la société IS) avec ceux de la fiscalité IR.

La fiscalité IS permet en effet une imposition moins lourde des résultats courants que la fiscalité IR. En revanche, la fiscalité IR est plus douce concernant l’imposition des plus-values de cession.

Le démembrement permet ainsi l’application de la fiscalité la plus avantageuse à chaque étape clef de la vie de la SCI tout en évitant les problématiques de cessation d’entreprise qui naîtraient d’un passage de l’IR à l’IS.

L’argumentation de l’administration

L’administration fiscale reprochait le but exclusivement fiscal de ce montage aux motifs que :

  • La société IS ne disposait d’aucun compte bancaire ni d’aucune trésorerie ;
  • Ses charges – essentiellement fiscales – étaient dans les faits acquittées par la SCI avant de se compenser avec le compte courant d’associé ouvert par la société IS en son sein (lequel était annuellement crédité par la quotepart de résultat lui revenant) ;
  • Enfin, la société IS n’avait d’autre activité, depuis sa création, que la seule détention de l’usufruit temporaire des parts de la SCI.

L’avis conforme du Comité

Le Comité s’est rallié à la position de l’administration en retenant que l’interposition, par le biais du démembrement des parts sociales, d’une société IS dépourvue de toute substance économique n’avait pour seule finalité que de permettre l’imposition des résultats de la SCI à l’IS en application de l’article 238 bis K du CGI.

Ce faisant, le Comité en déduit que les associés de la SCI ont commis un abus de droit en détournant les textes de leur finalité en vue d’en retirer un gain fiscal artificiel.

La leçon à retenir :

Le Comité réitère sa position en mentionnant explicitement que l’option d’une société pour l’assujettissement de ses bénéfices à l’IS n’est, en soi, aucunement constitutif d’un abus de droit quand bien même le régime d’imposition correspondant est plus favorable au contribuable.

Divers montages similaires ont ainsi pu être mis en place sans pour autant encourir la censure de l’affaire étudiée, mais au prix d’ajustements indispensables car si le démembrement de propriété n’est par principe pas proscrit, y recourir maladroitement est en revanche systématiquement censuré.

Remarque opérationnelle :

Les montages mettant en œuvre des droits de propriété démembrés doivent donc être maniés avec précaution : fleuretant avec l’abus de droit fiscal, le recours à ces concepts ne peut se faire sans une expertise certaine en la matière sous peine de voir la globalité du montage remise en cause.

Cumul d’avantages en matière de fiscalité immobilière : succession du régime des revenus fonciers avec celui des bénéfices industriels et commerciaux

Cumul d’avantages en matière de fiscalité immobilière : succession du régime des revenus fonciers avec celui des bénéfices industriels et commerciaux

UN PASSAGE DE LOCATIONS NUES VERS DES LOCATIONS MEUBLEES POSSIBLE SANS FROTTEMENT FISCAL

Le moment opportun du passage

A titre liminaire, il n’y aurait aucun intérêt à passer de locations nues à des locations meublées tant qu’un déficit foncier est constaté. Par ailleurs, un délai de 3 trois ans suivant l’année au titre de laquelle a été constatée la dernière imputation d’un déficit foncier sur le revenu global devra être observé sous peine de remettre en cause le bénéfice de cette imputation déficitaire.

Dans les faits, et sous réserve de toute analyse casuistique, un délai minimal de 5 ans suivant l’acquisition de l’immeuble peut raisonnablement être retenu.

Une absence totale d’imposition

Par principe, un changement de régime fiscal est juridiquement assimilé à une cessation d’entreprise et relève donc de la fiscalité applicable aux cessions à titre onéreux.

Néanmoins, de par l’application de règles tout à fait spécifiques, un tel changement peut parfaitement se faire sans frottement fiscal.

Ne seront ainsi pas dus ni les droits d’enregistrement, ni l’impôt sur la plusvalue (latente ou de cession) et enfin ni l’impôt sur les bénéfices (en cours ou en réserve).

UN CUMUL D’AVANTAGES SIGNIFICATIFS

Le bénéfice des régimes DF et BIC

Cette succession temporelle de régime d’imposition permet de tirer pleinement profit des avantages respectifs de chacun de ces régimes : imputations déficitaires sur le revenu global des déficits fonciers (sans limitation de montant en cas de monument historique) et recueil de loyers en franchise d’impôt sur les bénéfices commerciaux issus de la location meublée.

Autre avantage : la plus-value de cession qui sera constatée au moment de la vente relève du régime des plusvalues des particuliers lorsque le propriétaire est un loueur meublé nonprofessionnel !

L’intérêt du recours à une SCI 

Outre les avantages exposés, pouvoir intervenir dès le stade de l’acquisition de l’immeuble peut être l’occasion de rajouter une fonctionnalité d’ordre successoral au montage.

Pour une fiscalité identique à celle d’une acquisition en propre, le recours à une SCI couplée au démembrement permettra d’exclure par anticipation l’immeuble de la succession tout en permettant au donateur de s’en réservant la maîtrise de son vivant. Les règles spécifiques applicables aux sociétés permettent effectivement de renforcer considérablement l’effet de levier fiscal tout en assouplissant, de surcroît, les règles de gestion.

Droit des successions :

Les droits de succession sont dus par chaque héritier à concurrence de la valeur des biens lui revenant après, le cas échéant, application d’abattements dépendant de son lien de parenté avec le défunt.

Dès lors, soustraire des biens à la succession, en anticipant le transfert de propriété comme le permet le démembrement, permet de conserver le bénéfice de ces abattements pour la valeur restante des biens à transmettre.

Apporter un immeuble en société ?

Le coût fiscal de l’apport d’un immeuble en société peut être rendu nul sous réserve de strictement observer certaines conditions.

Hors cas d’option pour l’IS, l’interposition d’une société n’emportera pas de différence avec une détention en propre concernant les modalités d’imposition des revenus locatifs. En revanche, elle peut permettre de renforcer des effets de levier fiscaux ou d’offrir davantage de solutions suivant les objectifs recherchés

Précision sur le régime des sociétés mères : détenir n’implique pas voter

Précision sur le régime des sociétés mères : détenir n’implique pas voter

Une réponse subtile entre éligibilité au régime et bénéfice du régime

L’arrêt rendu par le Conseil d’Etat le 05/11/2014 (n° 370650, Sté Sofina) retient une interprétation littérale de la lettre du législateur : seuls 5% de détention en capital importent pour que puisse s’appliquer le régime, sans prise en compte pour l’appréciation de ce seuil des droits de vote attachés aux titres détenus. Le Conseil d’Etat précise toutefois que le bénéfice du régime d’exonération des remontées de dividendes (art. 216 du CGI) ne profiterait qu’aux titres assortis d’un droit de vote.

Comme en matière d’ISF, il convient donc de distinguer le seuil de déclenchement du seuil d’effet fiscal.

Les conséquences de cette réponse

Nul besoin donc que les titres retenus, pour l’appréciation du seuil de 5%, soient assortis d’un droit de vote, le Conseil d’Etat prenant même soin de préciser qu’il n’était pas plus besoin, « a fortiori, que les droits de vote éventuellement attachés aux titres de participation soient strictement proportionnels à la quotité de capital qu’ils représentent ».

Pour autant, et tel que souligné par le rapporteur public, cette solution est conciliable avec l’exception selon laquelle l’exonération bénéficie à l’ensemble des titres détenus, couverts ou non par un droit de vote, en cas de participation à hauteur d’au moins 5% en capital et droits de vote confondus (art. 145 6. b. ter du CGI).

Quelle portée ?

Cette précision, ainsi que l’obiter dictum de la plus haute juridiction administrative, bien que tous deux d’apparence anecdotiques, pourront néanmoins déboucher sur de nouvelles perspectives d’optimisation mettant en jeu ce régime avec notamment un recours à des actions de préférence, lesquelles peuvent moduler tant le droit de vote que le droit aux dividendes.

Plus largement, le recours à une SAS permettrait, par des dispositions statutaires adaptées, une encore plus grande liberté quant à ces modulations (sous réserve, notamment, de la prohibition des clauses léonines).

En fiscalité internationale

Distinguer le seuil d’applicabilité du régime de ses effets permet que soit transposée cette solution au seuil de 5% requis par la doctrine administrative pour que les sociétés filles soient dispensées de retenues à la source (prévues à l’art 119 bis 2 du CGI) sur leurs distributions de dividendes de source française au profit de sociétés mères européennes dès lors que ces dernières se trouvent, du fait d’un régime d’exonération applicable dans leur Etat de résidence, privées de toute possibilité d’imputer cette retenue (conséquences de l’arrêt Denkavit de la CJUE). Là était en effet l’enjeu de l’arrêt commenté : la doctrine ne visant que l‘éligibilité au régime, seule la détention capitalistique importe.

Les situations à distinguer :

Cette décision amène à distinguer plusieurs situations :

  • La société ne détient pas au moins 5% du capital : le régime ne pourra pas s’appliquer ;
  • La société détient au moins 5% du capital et 5% des droits de vote : le régime pourra pleinement s’appliquer sur l’intégralité des titres (même ceux n’étant pas assortis du droit de vote) ;
  • La société détient au moins 5% du capital mais moins de 5% des droits de vote : le seuil d’applicabilité du régime étant atteint, ce dernier pourra s’appliquer mais uniquement, cependant, sur les titres assortis d’un droit de vote.

 

Remarque opérationnelle :

Les possibilités d’optimisation offertes par cette précision mériteront, à notre sens, d’être sérieusement étudiées en lieu et place du recours au démembrement de propriété de titres avec tout son lot de contraintes et conséquences (bien que cette modalité présente, évidemment, d’autres charmes).

 

Rappel d’actualité :

L’article 212 du CGI a été modifié suite à la révision de la directive relative aux sociétés mères et filiales reprise à l’occasion de la LF 2014 : il n’est désormais plus possible de constater une charge financière déductible chez la fille et un produit de participation exonéré chez la mère en cas de prêt dit « hybride ». 

Point sur le régime d’imposition des plus values de cession de terrains à bâtir : le législateur légalise à nouveau la doctrine

Point sur le régime d’imposition des plus values de cession de terrains à bâtir : le législateur légalise à nouveau la doctrine

Le régime antérieur au 1er/02/2012

Le régime d’imposition des plus-values de terrains à bâtir correspondait à celui dont répondaient les propriétés bâties, à savoir une imposition au taux forfaitaire de 19% après application d’abattements linéaires de 10% par an à compter de la 6ème année, soit une exonération totale après 15 ans de détention.

Pour mémoire, la réforme de ce régime avait été reportée en partie concernant les terrains à bâtir à l’occasion de la 4ème loi de finances rectificative de 2011 (report pour les promesses de vente enregistrées avant le 25 août 2011 et dont l’acte authentique devait être signé avant le 1er janvier 2013).

Le régime postérieur au 1er/02/2012

Le régime s’appliquant était identique à celui des immeubles bâtis, soit :

  • Abattements de 2% entre la 6ème et la 17ème année ;
  • Abattements de 4% entre la 18ème et la 24ème année ;
  • Abattements de 8% au-delà, soit une exonération au bout de 30 ans.

Or, dans sa loi de finances pour 2013, le législateur supprimait, pour les terrains à bâtir, purement et simplement tout abattement pour durée de détention à compter du 1er/01/2013 et soumettait désormais ces plus-values au barème de l’IR. Ceci ayant été censuré par le Conseil Constitutionnel (la taxation pouvant s’élever jusqu’à 82%), le régime applicable depuis le 1er/02/2012 a donc, de fait, perduré.

Le maintien du régime

Vraisemblablement insatisfait de ce maintien du régime antérieur, le législateur est à nouveau intervenu en vue de supprimer cette fois uniquement les abattements pour durée de détention par le biais de la loi de finances pour 2014. Nouvel essai, nouvel échec : ces dispositions ont une nouvelle fois été censurées par le Conseil Constitutionnel pour rupture d’égalité devant les charges publiques.

Du fait de cette censure, l’administration a dû prendre acte du maintien du régime existant antérieurement depuis le 1er février 2012, soit une exonération d’imposition de la plusvalue après 30 ans de détention (rescrit n° 2014/01 du 09 janvier 2014).

Le nouveau régime

C’est dans ce contexte que vient d’intervenir le législateur afin d’aligner le régime fiscal et social des terrains à bâtir sur celui des propriétés bâties tel que réformé en 2013 (voir encadré cicontre). L’article 4 de la loi de finances pour 2015 étend ainsi le régime dit « dual » aux plus values de cession de terrains à bâtir et légalise à cette occasion une instruction administrative en date du 10 septembre 2014 qui instituait l’applicabilité de ce régime à compter du 1er septembre 2014.

Les plus values de cessions immobilières se voient désormais enfin harmonisées et sont exonérées d’impôt au bout de 22 ans de détention et de prélèvements sociaux au bout de 30 années.

Le régime « dual » :

Le nouveau régime « dual » d’imposition des plus-values a d’abord été mis en place pour l’imposition des plus-values de cession des propriétés bâties, à compter du 1er septembre 2013, par le biais de la publication d’un bulletin officiel des finances publiques légalisé à l’occasion de la loi de finances pour 2014. Ce régime a ensuite été rendu applicable aux plus-values de cession des terrains à bâtir depuis une instruction du 10 septembre 2014, à son tour légalisée par la loi de finances pour 2015.

Les abattements applicables sont désormais les suivants :

Pour le calcul de l’impôt sur le revenu au taux de 19% :

  • 6% de la 6ème à la 21ème année de détention ;
  • Puis de 4% au titre de la 22ème année, soit une exonération fiscale acquise après 22 ans.

Concernant le calcul des prélèvements sociaux :

  • 1,65% entre 6 et 21 ans de détention ;
  • 1,60% au titre de la 22ème année de détention ;
  • Puis 9% par an au-delà, soit une exonération au bout de 30 ans. 

L’engagement de l’Etat en faveur de la restauration immobilière !

L’engagement de l’Etat en faveur de la restauration immobilière !

L’Instruction du Gouvernement (LOGL1918090J) adressée aux Préfets le 29 juillet 2019 met à l’honneur la restauration immobilière. 

La volonté politique est claire : l’arrêt de l’étalement urbain et la restauration du patrimoine bâti. Le ministre de la transition écologique et solidaire Julien Denormandie fait partie des signataires. 

L’OBJECTIF DE ZÉRO ARTIFICIALISATION NETTE DU TERRITOIRE 

« L’instruction appelle au renforcement de la mobilisation de l’Etat local pour porter les enjeux de lutte contre l’artificialisation des sols ». 

« L’objectif de zéro artificialisation nette du territoire (…) suppose dans un premier temps d’infléchir la consommation, puis de la stopper par un usage sobre de l’espace (…) »

« La baisse du rythme de la consommation d’espace est un préalable impératif avant la mise en œuvre de l’objectif présidentiel ». 

« L’étalement urbain, lié au développement des zones pavillonnaires et à l’implantation de zones d’activités et de surfaces commerciales à la périphéries des métropoles et des agglomérations, emporte des contraintes économiques, sociales et environnementales pour les collectivités et l’ensemble de la population. »

[Extraits de l’instruction]

LA RESTAURATION DU PATRIMOINE BÂTI

« Il est essentiel de promouvoir des projets urbains qui délaissent une logique d’offre foncière au profit d’une vision politique et d’un projet de territoire raisonné. » La démarche « éviter, réduire, compenser » s’intègre au projet. 

Les Préfets sont invités à « encourager les projets ou les démarches visant la réhabilitation, la renaturation ou la désartificilisation de zones anthropisées ».

[Extraits de l’instruction]

L’instruction du gouvernement aux Préfets est claire : participer activement à la réhabilitation du bâti existant, lutter fermement contre les logements vacants et promouvoir le dispositif Denormandie

Une politique forte du renouveau des villes sur elles-mêmes est mise en place puisque le dispositif Denormandie n’a vocation à s’appliquer qu’à la restauration du patrimoine bâti tout comme le dispositif Malraux, dont la suppression est étonnement envisagée par le projet de loi de finances (voir bulletin). 

Les dispositifs Pinel appliqué à l’ancien et déficit foncier constituent également des outils en phase avec  la volonté gouvernementale. 

La redynamisation des centres villes passe par la conservation et la restauration du bâti existant dans le respect de son identité originelle.

L’AVENIR EST À L’ANCIEN !

La servitude de cour commune : une constructibilité améliorée par un aménagement entre voisins des règles de prospect

La servitude de cour commune : une constructibilité améliorée par un aménagement entre voisins des règles de prospect

LA COUR COMMUNE PERMET D’OBTENIR UN “ REPORT DE PROSPECT ” SUR UNE PROPRIETE VOISINE ET CONTIGUE

Définition

La cour commune permet au propriétaire d’un terrain de se conformer aux règles d’urbanisme relatives au prospect* en limitant la constructibilité, voire en l’interdisant sur le terrain voisin contigu.

La servitude peut porter sur :

  • une interdiction de construire sur la zone de la cour commune ;
  • une interdiction de bâtir au-delà d’une certaine hauteur.

L’existence d’une servitude de cour commune ne s’oppose pas :

  • à la validité d’une construction en sous-sol (Cass. 3° civ. 5 mai 1975 req. n°74- 14.464)
  • au surplomb d’un balcon qui ne constitue pas à une « construction » au sens des servitudes de cour commune (TGI Paris, 28 septembre 1988).

Même dans le silence du PLU

L’alinéa 2 de l’article L. 471-1 du code de l’urbanisme, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2011-1916 du 22 décembre 2011, précise que les servitudes de cours communes « peuvent être instituées en l’absence de document d’urbanisme ou de mention explicite dans le document d’urbanisme applicable ».

Une incertitude demeurait quant à l’applicabilité du texte aux PLU antérieurs à l’entrée en vigueur de l’ordonnance.

L’arrêt du Conseil d’Etat du 29 janvier 2014 précité permet l’institution d’une servitude de cour commune même dans le silence du PLU.

UNE FOIS INSTITUEE, LA COUR COMMUNE PRESENTE UN CARACTERE PERPETUEL

La création de la servitude

L’établissement d’une servitude de cour commune peut intervenir dans deux cas :

  • par voie amiable entre les parties. Ce dernier se matérialisera par une convention mentionnant l’assiette et les caractéristiques de la servitude.
  • par voie judiciaire, à défaut d’accord amiable entre les propriétaires. Cependant, le juge doit « concilier les intérêts des parties en cause tout en assurant le respect des prescriptions d’urbanisme » (article R. 471-2 du code de l’urbanisme). Il n’est ainsi jamais tenu d’instituer une servitude de cour commune.

Formellement, la demande de permis de construire sera complétée de ladite convention ou de la décision judiciaire (article R. 431-32, ibid.).

L’extinction de la servitude

Une fois établie, la servitude de cour commune est perpétuelle. Il ne sera pas possible d’y mettre fin par décision unilaté- rale du bénéficiaire ou de la personne publique compétente. En outre, la servitude ne disparaît pas en raison d’une modification des règles d’urbanisme ayant justifié son instauration (Cass. 3° civ. 23 janvier 2013 SCI Atys c. Raimondo – n°11-27086).

En revanche, l’extinction de la servitude de cour commune (article L. 471-2 du code de l’urbanisme) pourra être demandée par le propriétaire du terrain grevé :

  • si le permis de construire n’est pas délivré dans un délai d’un an à compter de l’institution de la servitude ;
  • si le chantier n’a pas débuté dans l’année suivant la délivrance du permis ou s’il a été interrompu pendant un an.

* Prospect : distance minimale autorisée par l’article 7 du PLU entre les constructions et les limites séparatives de propriétés contiguës.

L’article L. 471-1 alinéa 1 du code de l’urbanisme précise que :

« Lorsqu’en application des dispositions d’urbanisme la délivrance du permis de construire est subordonnée, en ce qui concerne les distances qui doivent séparer les constructions, à la création, sur un terrain voisin, de servitudes de ne pas bâtir ou de ne pas dépasser une certaine hauteur en construisant, ces servitudes, dites « de cours communes », peuvent, à défaut d’accord amiable entre les propriétaires intéressés, être imposées par la voie judiciaire dans des conditions définies par décret ».

A noter :

  • Lors de la création d’une servitude de cour commune, l’article L. 471-3 du code de l’urbanisme prévoit le principe d’indemnisation du propriétaire des terrains grevés par le bénéficiaire de la servitude.
  • Si le règlement du PLU comporte des « prescriptions particulières » sur l’application de la règle de prospect en présence d’une servitude de cour commune, il convient de les respecter (CE 13 mars 2013 SCI La Colonie, req. n° 346916).