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Obtenir la communication de documents indispensables : penser au référé mesures-utiles…

Depuis la loi NOTRe, les transferts de compétences entre collectivités n’ont cessé de s’accroître. La forme de coopération prévue par l’article L. 5111-1 alinéa 1 du CGCT permet d’aboutir, à l’issue du processus de transfert, à une mutualisation des services aboutie et pérenne. Dans l’intervalle toutefois, les rapports entre collectivités peuvent s’avérer délicats, notamment lorsqu’il est question d’obtenir des documents indispensables pour la passation de contrats de la commande publique (1). C’est dans ce contexte que le recours au référé mesures-utiles prévu à l’article L. 521-3 du CJA peut s’avérer opportun. Cette procédure, bien que subsidiaire, apparaît en effet adéquate pour obtenir la communication de documents en urgence. Peu usité dans les relations entre les collectivités, le référé mesures-utiles est pourtant un outil adapté (I.) tout autant qu’efficace (II.).  

I. Le référé mesures-utiles, un outil adapté

Une alternative à la saisine de la CADA

La liberté d’accès aux documents administratifs, rappelée à l’article L. 300-1 du CRPA, englobe les demandes de transmission formulées entre collectivités. Or, il arrive que certaines d’entre elles se montrent réticentes à accéder à de telles demandes.

Dans cette configuration, pour des collectivités faisant face à des impératifs toujours plus forts et à brève échéance (renouveler des contrats de la commande publique ; assurer la continuité et mutabilité des services publics ; mener à bien les transferts de compétences ; etc.), la saisine de la CADA (2) ne constitue pas la solution la plus opérationnelle. Cette procédure nécessite effectivement du temps, ce dont les collectivités, le plus souvent, ne disposent pas. 

En effet, pour aller devant la CADA, il est nécessaire de formuler une première demande auprès de la collectivité détenant les documents souhaités. Cette dernière peut expressément refuser d’accéder à la demande ou garder le silence durant un mois, ce qui constitue un refus implicite. En présence de tels refus, la CADA peut être saisie (sachant que cette saisine constitue un préalable obligatoire à la contestation du refus au contentieux). Cette commission se prononce dans un délai de deux mois, faute de quoi le recours devant elle est réputé rejeté. En cas d’avis négatif de la CADA ou de réitération du refus initial par la collectivité récalcitrante en dépit d’un avis favorable de la CADA, le juge pourra alors être saisi.

La lourdeur de cette procédure empêche souvent les collectivités d’assurer correctement leurs missions en temps et en heure. 

Dans ce contexte, la saisine du juge du référé mesures-utiles peut s’avérer une action contentieuse plus efficace : juge de l’urgence, il devra en effet se prononcer dans les meilleurs délais. 

La relative souplesse des conditions de recevabilité

Si le référé mesures-utiles est assez souvent mis à profit par les administrés en matière de communication de documents administratifs, il est bien moins utilisé à cette fin par les collectivités. Pourtant, la relative souplesse de ses conditions de recevabilité constitue, pour celles-ci également, un véritable atout. Ainsi :

  1. la condition d’urgence est assez aisément satisfaite, notamment lorsqu’il s’agit de préparer, à court -voire moyen- terme, un contrat de la commande publique ou un transfert de compétences ;
  2. il en va de même pour ce qui est de la condition tenant à l’utilité de la demande. Sera ainsi, par exemple, satisfaite toute demande de communication qui apparaît « nécessaire à la continuité et au bon fonctionnement du service public » (3) ;
  3. plus délicate est la condition s’attachant à l’absence d’obstacle à l’exécution d’une décision administrative. En ce sens, le refus de la collectivité, de transmettre des documents, est une décision administrative(4). Ainsi, introduire un référé mesures-utiles afin de contrer ce refus constitue un obstacle à l’exécution d’une décision administrative. Pour pallier ce risque d’irrecevabilité, il convient d’introduire le référé mesures-utiles juste après avoir formé la demande de communication afin d’éviter une quelconque réponse du destinataire(5).

Précisons enfin que ce recours est recevable en l’absence de recours parallèle au fond (contrairement au

référé-suspension (6)) et, on l’a vu, sans décision administrative préalable, ce qui assure un gain de temps indéniable pour celui qui l’intente.

II. Le référé mesures-utiles, un outil efficace

Un juge doté de forts pouvoirs

Alors que le référé mesures-utiles constitue un recours subsidiaire au regard des référés d’urgence plus classiques (tels le référé-liberté ou le référé-suspension) (7), l’office du juge n’y est pas moins efficient. 

Par nature, il lui revient en effet de prononcer des injonctions de faire (dès lors qu’elles sont « utiles »), parfois à destination de personnes privées, mais également (le plus fréquemment) à l’encontre d’administrations.

Dès lors, et bien que l’article L. 511-1 du CJA rappelle que le juge du référé peut uniquement, en principe, prononcer des mesures provisoires, il peut toutefois faire droit à la demande d’ordonner à la collectivité défaillante la communication des documents qu’elle détient. Cette mesure prononcée par le juge du référé mesures-utiles n’est pas contraire à ses attributions.

Par ailleurs, lorsque ce dernier enjoint à une collectivité de délivrer un document, il lui fixe un bref délai pour s’y conformer.

Il a même la possibilité d’assortir cette injonction d’une astreinte. Toutefois, dans le contexte des relations entre collectivités où la recherche d’une certaine harmonie doit être de mise, la radicalité d’une telle demande peut sembler inadaptée. 

Une solution rapide et possiblement consensuelle

Face à un refus de transmission de documents, la démarche contentieuse est souvent exclue par les collectivités car perçue comme chronophage et susceptible de crisper encore plus une situation déjà problématique.

  • Sur le premier point, on doit relever que le juge du référé mesures-utiles, juge unique, se prononce dans un délai variant entre quelques jours et un mois, selon l’urgence de la situation. On mesure tout l’intérêt d’intenter un tel recours plutôt que de suivre la voie « normale » qui, durant plusieurs mois, s’enlise dans les méandres de l’opposition du refus initial, de l’avis de la CADA et de l’éventuel contentieux qui s’ensuit. Et ce, d’autant plus lorsque la CADA a eu, dans des affaires précédentes, l’occasion de se prononcer sur le caractère communicable du type de documents au cœur du litige…
  • Sur le second point, il n’est pas rare qu’une telle démarche contentieuse, en raison justement de sa brièveté et des échanges -éventuellement oraux- qu’elle suscite entre les protagonistes, parvienne à débloquer la situation avant même que le juge ait à se prononcer, ce qui aboutit à un non-lieu à statuer dès lors que les documents en litige auront été effectivement communiqués.

Utiliser cette voie de droit peut ainsi apparaître comme une stratégie contentieuse susceptible de débloquer rapidement la situation. D’une part, par la survenance d’une décision juridictionnelle rapide, et d’autre part, par la création d’un rapport de force susceptible d’ouvrir de nouveaux échanges. 

Quelques précisions

  1. La passation de contrats de la commande publique suppose en effet, afin d’établir un appel d’offre dans l’objectif de renouveler un marché public ou une DSP, de connaître les informations sur le contrat qui arrive à échéance. Ces données sont en effet primordiales puisqu’elles permettent au pouvoir adjudicateur de définir ses besoins et d’ajuster le contrat futur sur le double aspect juridique et financier. 
  2. article L. 340-1 CRPA.
  3. CE 29 juillet 2002, CH d’Armentières, n°243500.
  4. CE 18 novembre 2015, Section française OIP, n°383189 ; CE 04 février 2021 n°441048.
  5. CE, 28 novembre 2018, Fock Sho Thien, n°420343.
  6. article L. 521-1 CJA.
  7. CE, 27 mars 2015, n°385332.

Abréviations

CGCT : code général des collectivités territoriales 

CJA : code de justice administrative

CADA : commission d’accès aux documents administratifs

CRPA : code des relations entre le public et l’administration

DSP : délégation de service public

SCCV : des interrogations et des opportunités

La Société civile de construction-vente (SCCV) est une forme sociale incontournable dans les métiers de la promotion immobilière. Mais son régime juridique et fiscal hybride (la promotion immobilière étant juridiquement civile, mais fiscalement commerciale) rend son maniement délicat. Aussi les complexités inhérentes à la SCCV doivent-elles être appréhendées avec précaution, notamment lorsque les associés ont des objectifs différents, que ce soit en termes de gouvernance, de responsabilité ou de liquidité.

Retour sur les principales caractéristiques de la SCCV et sur les principaux moyens d’en sécuriser le fonctionnement.

Un régime fiscal favorable, mais encadré

Une société civile qui exerce une activité commerciale est imposable de plein droit à l’impôt sur les sociétés (article 8 du Code général des impôts). Mais la SCCV bénéficie d’un régime fiscal favorable : ses associés sont imposés directement sur la part du résultat leur revenant (article 239 ter du Code général de impôts), à l’instar des associés d’une société en nom collectif, à condition que la SCCV respecte plusieurs conditions :

– elle doit avoir pour objet social mais aussi pour activité effective la construction d’immeubles en vue de la revente. L’exercice d’autres activités est susceptible de remettre en cause le régime fiscal.

  • Si l’exercice d’une activité de location nue n’entraîne généralement pas de risque de requalification, il peut en aller autrement si l’activité effective est commerciale (revente en l’état, location meublée…).
  • A l’inverse, une société civile dont l’objet statutaire est l’acquisition et la gestion d’immeubles, mais qui réalise des opérations de promotion, relève de plein droit du régime spécial, sans possibilité d’option pour l’impôt sur les sociétés (CE, 13 octobre 2023 n° 446017), ce qui peut s’avérer très défavorable si les associés sont des personnes physiques.

– les statuts de la société doivent prévoir la responsabilité indéfinie des associés en ce qui concerne le passif social.

  • En revanche, des garanties spécifiques ou des limites aux engagements d’un associé peuvent être aménagées dans un acte extrastatutaire

La responsabilité renforcée des associés

1- L’obligation aux dettes

A l’instar des associés d’une société civile, les associés de SCCV répondent du passif social sur leur patrimoine  personnel à proportion de leurs droits sociaux (il est donc déconseillé aux personnes physiques de participer à une SCCV).

Mais cette obligation est renforcée, sur le modèle des sociétés en nom collectif  :

  • Les associés sont responsables des dettes sociales à proportion de la participation qu’ils détiennent à la date de la naissance de la dette sociale, et non à la date de son exigibilité (Civ. 3e, 6 juillet 2023, n° 21-20.620). Cette différence est sensible pour l’associé qui entre ou sort du capital alors que l’opération de construction est en cours.
  • Les créanciers de la société peuvent poursuivre les associés après une simple mise en demeure adressée à la société restée infructueuse (et non après avoir vainement poursuivi la société)/
  • Le pacte d’associés peut mettre en place des mécanismes permettant d’anticiper les éventuelles difficultés et leurs conséquences.

2- La contribution aux charges de construction

Contrairement au droit commun, la loi prévoit que le gérant peut appeler auprès des associés les fonds nécessaires à l’accomplissement de l’objet social à proportion des droits de chacun (art. L. 211-3 du CCH).

  • Cet apport de fonds peut être réalisé, au choix de la gérance, sous forme, soit d’augmentation de capital, soit d’apport en compte courant d’associé.
  • La jurisprudence a restreint le champ d’application  des appels de fonds aux seules sommes nécessaires à l’exécution de contrats de VEFA déjà conclus ou à l’achèvement de programmes dont la réalisation, déjà commencée, n’est pas susceptible de division. A l’inverse, il ne peut être procédé à des appels de fonds qui ne seraient pas nécessaires à l’achèvement d’une construction (visant, par exemple, à l’apurement de dettes de la société).

Les associés sont tenus d’y répondre. A défaut, ses parts sociales sont mises aux enchères publiques.

  • Le pacte d’associés peut cependant créer des mécanismes (garanties, sortie forcée) permettant d’éviter que les parts de l’associé défaillant ne soient ainsi vendues aux enchères.

Illustrations : deux situations particulières

1- SCCV et bailleurs sociaux

La loi ALUR, puis la loi ELAN, ont offert la possibilité aux bailleurs sociaux (offices publics, SA ou coopératives d’HLM) d’acquérir, « à due concurrence de leurs apports », des logements auprès d’une SCCV (art. L. 421-1 du CCH), à condition, notamment :

  • que la SCCV réalise au moins 25% de logements locatifs conventionnés (PLS, PLUS, PLAI) ou en accession sociale,
  • qu’elle soit constituée pour une durée n’excédant pas dix ans.

Ce régime permet d’associer pleinement le promoteur et le bailleur social à la maîtrise d’ouvrage et la réalisation de l’opération et d’en améliorer le financement.

Dans certaines circonstances, les règles de la commande publique peuvent cependant s’appliquer.

2- SCCV ou SNC ?

Contrairement à la SCCV, dont le régime fiscal de faveur est encadré (cf. ci-contre), la SNC est fiscalement translucide, quelles que soient ses activités.

En cas de réalisation d’opérations mixtes, ou de doute sur la nature précise de l’opération à venir, le recours à la SNC plutôt qu’à la SCCV permettra de conserver le bénéfice de la translucidité fiscale, sans encourir le risque d’une imposition à l’impôt sur les sociétés.

Nouveau délit de mise à disposition d’instruments de facilitation de la fraude : Quel risque pénal ?

Loi de finances pour 2024 – article 1744 du CGI

Le nouveau délit a vocation à sanctionner la mise à disposition d’instruments facilitant une fraude fiscale, indépendamment de la démonstration de l’existence d’une fraude subséquente, consommée ou même tentée par le client. Professionnels du droit et du chiffre : votre client n’a donc plus besoin d’utiliser l’information fiscale fournie pour que vous soyez poursuivi devant le juge pénal !

I. Les professionnels ciblés : pas de limitation à certaines professions

En introduisant cette nouvelle incrimination dans son arsenal de lutte contre la fraude fiscale, le législateur vise à poursuivre et à sanctionner l’ensemble des personnes physiques ou morales promouvant des dispositifs fiscaux visant à éluder l’impôt. Contrairement à d’autres types d’incrimination, tels que l’article 1740 A bis du CGI, le texte d’incrimination de l’article 1744 ne vient aucunement limiter l’application du délit à certains types de professions.

Il peut donc s’agir, selon la définition des intermédiaires fiscaux donnée par l’OCDE, de :

« fiscalistes, d’avocats et conseillers juridiques, de comptables, de conseillers financiers, d’établissements bancaires et financiers, d’agents spécialisés dans la constitution de sociétés, d’agents agréés, de notaires, de fiduciaires économiques, de prestataires de services aux entreprises et aux fiducies, et d’autres promoteurs de mécanismes de fraude fiscale » (OCDE, Rapport du 25/02/21 « En finir avec les montages financiers abusifs : réprimer les intermédiaires qui favorisent les délits fiscaux et la criminalité en col blanc »).

En réalité, ce sont prioritairement les promoteurs de schémas ou de dispositifs fiscaux frauduleux qui sont visés par cette infraction.  La création de ce délit s’inscrit ouvertement dans la lutte « contre la commercialisation, notamment sur internet et les réseaux sociaux, de schémas de fraude fiscale ou d’outils juridiques et financiers destinés à dissimuler des revenus ou patrimoine » (Rép. min. n°7339, JO 19 septembre 2023, p. 8305).

II. Présentation du nouveau délit

Des éléments constitutifs largement définis

Des règles de poursuites allégées

Contrairement à l’infraction de fraude fiscale qui fait l’objet d’un traitement procédural singulier, le législateur a affranchi ce nouveau délit de règles procédurales particulières (articles L. 227 à L. 233 du LPF).

L’infraction est susceptible d’être poursuivie dans les conditions de droit commun.

Ainsi, la règle du verrou de Bercy, exigeant une plainte préalable de l’Administration fiscale, n’est donc pas applicable (article L. 228 du LPF) à cette nouvelle infraction.

L’intérêt répressif de l’infraction

Auparavant, lorsque des intermédiaires fiscaux faisaient la promotion de dispositifs fiscaux frauduleux, ils étaient susceptibles d’être incriminés sur le terrain de la complicité de droit commun des articles 121-6 et 121-7 du code pénal. Mais cette complicité nécessite, pour être poursuivie, un fait principal punissable, à savoir une fraude fiscale, consommée ou tentée.

Le nouvel article 1744 du CGI s’affranchit de cette contrainte : le comportement est punissable à titre autonome, sans avoir besoin de démontrer la commission ou la tentative de l’infraction de fraude fiscale. L’intérêt répressif de l’incrimination est évident : l’intermédiaire pourra être condamné dès la présentation d’instruments de facilitation, que ceux-ci aient été ou non effectivement utilisés par un contribuable.

Quelques précisions

À retenir : La nouvelle peine complémentaire « d’indignité fiscale » instaurée par la LF 2024, à savoir la privation du droit à l’octroi de réductions ou crédits d’IR ou d’IFI, est applicable à ce nouveau délit.

Les peines encourues

Pour les personnes physiques

   Peines principales

3 ans d’emprisonnement + amende de 250 000 €.

    Peines aggravées

5 ans d’emprisonnement + 500 000 € d’amende lorsque l’infraction est commise en utilisant un service de communication au public en ligne.

   Peines complémentaires  

– Celles visées à l’art. 1741 du CGI ;

– Interdiction d’exercer certaines professions et suspension du permis de conduire (art. 1750 du CGI).

Pour les personnes morales

   Peines principales

Amende de 1 250 000 €, portée à 2 500 000 € lorsque la mise à disposition est réalisée via un service de communication en ligne.

   Peines complémentaires

Peines complémentaires des 1°, 6°, 9° et 12° de l’art. 131-39 du code pénal.

Abréviations :

CGI : Code général des impôts

IFI : impôt sur la fortune immobilière

IR : impôt sur les revenus

LPF : Livre des procédures fiscales

JO : Journal officiel OCDE : Organisation de coopération et de développement économiques

Préparation budgétaire 2024 : Un nouveau levier sur la TEOM !

Confrontés à une hausse de leurs dépenses de fonctionnement liée à l’envolée des prix de l’énergie ou à la hausse du point d’indice, alors que leurs recettes n’augmentent pas suffisamment (perte du levier sur la TH depuis le 1er janvier 2021), les EPCI devraient subir un effet de ciseaux en 2024. Pour rappel, la perte pour les communes est estimée aux environs de 15,3 milliards d’euros (Md €) de taxe d’habitation et jusqu’à 7,5Md€ pour les EPCI. La crise immobilière de 2023 va se poursuivre en 2024, en réduisant encore les recettes tirées des droits de mutation. Dans ce contexte, la taxe d’enlèvement des ordures ménagères1 (TEOM) présente un levier pour les collectivités à condition de pouvoir y intégrer certaines dépenses. Considérant les nombreuses évolutions depuis ces deux dernières années, un coup de projecteur sur cette taxe s’impose, notamment s’agissant des questions relatives à la détermination du taux. Si le contexte jurisprudentiel apparait favorable à l’établissement d’un taux de TEOM excédentaire (I.), il faut toutefois veiller à utiliser ce mécanisme permettant de dégager des marges de manœuvres fiscales avec agilité et établir une stratégie (II.).

I. La pratique désormais autorisée du taux de TEOM excédentaire

La prohibition initiale de tout excédent…

En application du plan national de prévention de la production de déchets, renforcé par la loi Économie circulaire de février 20202, le gouvernement vise à réduire à l’horizon 2030 le volume d’ordures ménagères produit par habitant en France à 501 kg.

La Cour des comptes constate que cet objectif ne pourra être atteint sans une accélération forte de cette tendance3. Au titre des pistes de réflexion, elle met en avant l’efficacité de différents mécanismes fiscaux, dont notamment la TEOM.

En 2014, le Conseil d’État considère, dans sa décision Société Auchan4, que cette taxe na « pas le caractère d’un prélèvement opéré sur les contribuables en vue de pourvoir à l’ensemble des dépenses budgétaires mais a exclusivement pour objet de couvrir les dépenses exposées ». Dès lors,  « le produit de cette taxe et, par voie de conséquence, son taux, ne doivent pas être manifestement disproportionnés par rapport au montant de ces dépenses, tel qu’il peut être estimé à la date du vote de la délibération fixant ce taux ».

En application de cette jurisprudence, relevant en l’espèce qu’un excédent de 2,5 % constituait une erreur manifeste d’appréciation, les collectivités devaient voter un taux de TEOM à l’équilibre avec le coût du service. Cette analyse contraignait fortement l’augmentation des taux de TEOM.  Elle faisait supporter un risque d’annulation des délibérations portant sur le vote des taux.

… Mais un excédent dorénavant autorisé jusqu’à 15 %

En 2021, Le Conseil d’État a fait évoluer sa jurisprudence pour admettre qu’un taux de TEOM excédentaire, en l’occurrence de presque 15 %, est proportionné5.

Cette ouverture reste toutefois pragmatique, un excédent de plus de 59 % a logiquement été considéré manifestement disproportionné6.

Par ailleurs, une instruction du 15 mars 2022 de la DGFiP à destination des préfets et directeurs départementaux des finances publiques, relative au contrôle de légalité en matière de TEOM s’inscrit dans cette logique, indiquant un seuil maximum  de proportion à hauteur de 15 %. La doctrine fiscale reprenant elle aussi cette limite de 15 %7.

Le Conseil d’État est venu confirmer cette tendance initiée depuis 2021. Il reconnait par une décision d’avril 20238, mentionnée aux tables, qu’un taux excédentaire de 13,84 % n’est pas disproportionné.

Si cette décision peut être considérée comme d’espèce sur ce point, il n’en demeure pas moins qu’elle permet d’asseoir un peu plus une pratique qui ouvre quelques marges de manœuvre pour financer la gestion des déchets et de ses dépenses connexes. Enfin, si aucun seuil maximum n’est déterminé, il semblerait cependant que le repère de 15 % constitue actuellement une limite proportionnée à ne pas dépasser.

II. La TEOM, une stratégie pour développer des marges de manœuvre fiscales

Dépenses comprises et définition du déchet ménager

Pour déterminer le produit de la TEOM, et in fine, un éventuel excédent, il appartient de connaître les dépenses couvertes par la TEOM. Ainsi, sont comprises :

les dépenses de fonctionnement réelles exposées pour le service de collecte de déchets ménagers et assimilés. Peuvent intégrer cette catégorie, les coûts de directions ou services transversaux de la collectivité directement exposés pour le service public8 ou les charges exceptionnelles de fonctionnement lorsqu’elles n’ont pas le caractère de dépenses d’ordre9 ;  

•les dépenses non couvertes par la redevance spéciale ou d’autres recettes non fiscales10.

Plus récemment, par un arrêt du 18 septembre 202311, la haute juridiction administrative est venue clarifier la définition du déchet ménager12 comme étant « tout bien ayant la nature d’un déchet habituellement produit par les ménages, que ce soit au sein ou hors du foyer. »

Ainsi posée, la vision extensive du Conseil d’Etat sur la définition du déchet ménager « par nature » pourrait également permettre aux collectivités d’inclure les dépenses liées à la collecte et au traitement des déchets et immondices jetés sur la voie publique

Réévaluer et contrôler ce levier fiscal

S’il ressort des éléments précédents que le taux de TEOM peut être dans une certaine mesure excédentaire en intégrant les dépenses autorisées, encore faut-il régulièrement identifier ces dépenses.

Le Conseil d’État a considéré qu’une comptabilité analytique permet d’identifier avec précision ces dépenses au moyen notamment de l’utilisation de clés de répartition13.

Par ailleurs, dans un contexte de financement des collectivités locales jugé « à bout de souffle14 », la question de la capacité des communes et EPCI à dégager des marges de manœuvre fiscales est essentielle.

La TEOM est une taxe facultative, dont l’assiette repose, comme la taxe foncière sur les propriétés bâties et sur la propriété immobilière.  Son montant ne dépend pas du service rendu à l’usager, ce qui permet d’assujettir des propriétés qui ne produisent pas de déchets ménagers au sens des dispositions du CGCT, ou qui n’utilisent pas ce service. Cet enjeu est central dans les communes touristiques.

La conséquence pratique de cette rétrospective de la vision du Conseil d’Etat doit alors intéresser les collectivités dans les coûts à prendre en considération dans la collecte et le traitement des déchets et ainsi réviser le taux de TEOM ou bien constituer une piste de réflexion dans sa mise en œuvre.

Quelques précisions

1 : Article 1520 du CGI

2 : Loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire ayant fait évoluer l’art. L.541-1 du code de l’environnement 

3 : Rapport de septembre 2022 intitulé « Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers : une ambition à concrétiser »

4 : Conseil d’État, 31 mars 2014, Société Auchan, n° 368111 – Mentionné aux tables du recueil Lebon

5 : Conseil d’État, 8ème Ch., 5 mai 2021, n° 438897

6 : CAA Nancy, 3 février 2022, n° 21NC00281

7 : BOFIP n° BOI-IF-AUT-90-30-10

8 : Conseil d’État, 14 avril 2023, n° 465403 – Société OPPCI Sogecapimmo – Mentionné aux tables du recueil Lebon

9 : Conseil d’État, 22 octobre 2021, Métropole de Lyon, n° 434900 – Publié au recueil Lebon

10 : Conseil d’État, 29 novembre 2021, Métropole de Lyon, n° 454684

11 : Conseil d’État, 18 septembre 2023, n° 466461

12 : Article R.541-8 C. de l’environnement et art. R.2224-23 du CGCT

13 : Conseil d’État, 30 septembre 2022, Sté Euro Dépôt Immobilier, n° 455364 – Mentionné aux tables du recueil Lebon

14 : Rapport de la Cour des comptes d’octobre 2022 relatif au financement des collectivités territoriales

Abréviations

TH : taxe d’habitation

TEOM : taxe d’enlèvement des ordures ménagères

CGCT : code général des collectivités territoriales

DGFiP : Direction Générale des Finances Publiques

EPCI : établissement public de coopération intercommunal

Comprendre les nouvelles obligations applicables au 1er janvier 2024 en matière de « verdissement  » et de solarisation des toitures, c’est possible (et souhaitable) !

L’article 101 de la loi dite « Climat & Résilience » du 22 août 2021 avait introduit deux articles aux codes de la construction et de l’habitation (art. L. 171-4 CCH) et de l’urbanisme (art. L. 111-19-1 CU) pour imposer à certaines constructions et aux parcs de stationnement associés l’intégration de procédés de production d’ENR ou une végétalisation en toiture et à certains parcs de stationnement des dispositifs d’ombrage et de gestion des eaux pluviales. Le décret du 18 décembre 2023 et deux arrêtés du 19 décembre 2023 sont enfin venus apporter des détails sur la mise en œuvre pratique – mais non moins complexe – de ces dispositifs.

I. Des obligations applicables à certaines constructions

Bâtiments concernés

L’article L. 171-4 du CCH prévoit une obligation de solarisation ou de végétalisation de certains bâtiments ou parties de bâtiments. Il est applicable aux « constructions neuves », « extensions » et « rénovations lourdes ».

Ce champ d’application a été précisé par le décret du 18 décembre 2023. Sont concernés:

•les bâtiments dont au moins la moitié de la surface de plancher est affectée à un ou plusieurs usages visés à l’article L. 171-4 (commercial, industriel ou artisanal, entrepôts, hangars non ouverts au public faisant l’objet d’une exploitation commerciale, parcs de stationnement couverts accessibles au public ayant une emprise au sol > 500 m2 et bureaux ayant une emprise au sol > 1 000 m2) indépendamment de l’usage auquel est affectée sa toiture (art. R. 171-32 CCH)1 ;

•les « rénovations lourdes », c’est-à-dire les travaux « qui ont pour objet ou qui rendent nécessaire le renforcement ou le remplacement d’éléments structuraux concourant à la stabilité ou à la solidité du bâtiment » (art. R. 171-33 CCH).

Travaux à réaliser

Aux termes des dispositions de l’article L. 171-4 du CCH, le maître d’ouvrage doit intégrer sur les bâtiments ou parties de bâtiments assujettis :

•soit un procédé de production d’énergies renouvelables (solaire photovoltaïque, solaire thermique par ex.) ;

•soit un système de végétalisation en toiture présentant des performances décrites par cet article.

L’article 1er de l’arrêté du 19 décembre 2023 précise la proportion de surface à équiper :

•minimum 30% de la surface de la toiture à compter du 1er janvier 2024 ;

•minimum 40% de la surface de la toiture à compter du 1er juillet 2026 ;

•minimum 50% de la surface de la toiture à compter du 1er juillet 2027.

S’agissant des systèmes de végétalisation des toitures, l’arrêté du 19 décembre 2023 fixe les caractéristiques minimales que doivent respecter ces installations (épaisseur substrat, capacité de rétention d’eau, nombre et type de végétaux, alimentation en eau, etc.). 

II. Des obligations applicables à certains parcs de stationnement

Parcs concernés

L’article L. 111-19-1 CU impose aux nouveaux parcs de stationnement extérieurs (excluant les parcs en infrastructure ou en superstructure) ouverts au public de plus de 500 m2 (environ 20 places automobiles) et aux aires de stationnement associées aux bâtiments auxquels s’applique l’obligation prévue à l’article L. 171-4 du CCH (construction, extension, rénovation lourde2), la mise en place de dispositifs de gestion des eaux pluviales (art. R. 111-25-3 CU) et de dispositifs végétalisés ou d’ombrières (art. R. 111-25-7 CU).

Le décret du 18 décembre 2023 permet de déterminer le calcul de la superficie des parcs de stationnement à observer pour remplir ces deux types d’obligations. Il convient ainsi de prendre en compte :

•les emplacements destinés au stationnement des véhicules et de leurs remorques ;

•les voies et cheminements de circulation ;

•les espaces prévus pour l’intégration des dispositifs de gestion des eaux pluviales (non applicable à la superficie prise en compte pour les dispositifs d’ombrage).

Sont exclus du calcul les espaces verts, de repos, de stockage, logistiques, de manutention et déchargement.

Travaux à réaliser

Aux termes de l’article L. 111-19 CU, ces parcs et aires de stationnement assujettis doivent intégrer :

– d’une part, sur au moins 50% de leur surface, des revêtements de surface, des aménagements hydrauliques ou des dispositifs végétalisés favorisant la perméabilité et l’infiltration des eaux pluviales ou leur évaporation (dispositif de gestion des eaux pluviales) ;

– d’autre part, des dispositifs végétalisés ou des ombrières sur au moins 50% de leur surface (dispositif d’ombrage).

Lorsque l’ombrage est assuré par des arbres, l’obligation est satisfaite par la plantation d’arbres à canopée large à raison d’un arbre pour trois places (art. R. 111-25-8 CU).

En cas d’ombrières, celles-ci intègrent des modules photovoltaïques (cf. Vocabulaire de la transition climatique et énergétique en ville – 22 avril 2023 :  «  structure artificielle équipée de panneaux photovoltaïques qui a pour double fonction de procurer de l’ombre et de produire de l’énergie électrique »).

Quelques précisions

1 A compter du 1er janvier 2025 l’obligation prévue à l’art L. 171-4 CCH sera étendue aux bureaux, bâtiments administratifs, hôpitaux, équipements  sportifs, récréatifs et de loisirs et aux bâtiments scolaires et universitaires (extension du champ d’application par l’article 40 de la loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 dite « APER » ).

2 Une « rénovation lourde » correspond au remplacement total du revêtement de surface au sol sur une superficie représentant au moins la moitié de la superficie du parc de stationnement.

Quand s’appliquent ces nouvelles obligations ?

Elles sont applicables :

– aux demandes d’autorisations déposées à partir du 1er janvier 2024 ;

– à défaut, si la date d’acceptation des devis ou de passation des contrats relatifs aux travaux de rénovation est postérieure au 1er janvier 2024 ;

– aux parcs faisant l’objet de la conclusion ou d’un renouvellement de contrat de concession de service public, de prestation de service ou de bail commercial à compter du 1er janvier 2024.

Comment bénéficier d’une exonération ?

S’agissant de l’obligation de « verdissement » des bâtiments, l’autorité compétente en matière d’autorisation d’urbanisme peut, dans certains cas, dispenser le maître d’ouvrage du respect de ces obligations (contraintes techniques, de sécurité, architecturales ou patrimoniales, conditions économiquement non acceptables). Le décret précise les critères relatifs à ces exonérations (cf. art. R. 171-34 à R. 171-42 CCH, et art. 2 à 4 de l’arrêté du 19 décembre 2023 : dépassement de 15% du coût global des travaux).  

S’agissant de l’obligation de « verdissement »  des   parcs de stationnement, le décret liste les raisons justifiant une exonération (contraintes techniques liées à la nature du sol ou à l’usage du parc,  impossibilité technique de ne pas aggraver un risque naturel, contrainte technique engendrant des coûts d’investissement portant une atteinte significative à la rentabilité, absence d’ensoleillement, etc.). Ces critères diffèrent selon le dispositif mis en place (gestion des eaux pluviales ou ombrage), (cf. art. R. 111-25-4 à R. 111-25-6 CU & art. R. 111-25-9 à R. 111-25-15 CU).

Eu égard à la quantité de précisions apportées par le décret, nous accompagnons les porteurs de projet souhaitant bénéficier de ces cas d’exonérations lors de la conception de leur dossier de demande afin de maximiser les chances de les obtenir.

Quelle conséquence sur la demande d’autorisation d’urbanisme ?

Afin de faire état du projet d’installation du dispositif, une attestation devra être jointe au dossier de demande (cf. II. art. R. 171-33 CCH & R. 441-8-4 CU).

Si le bénéfice d’une exonération est sollicité, une attestation justifiant l’exception et comprenant, en fonction de celle-ci, un résumé non technique, une note de calcul, des devis d’entreprises spécialisées, un exposé des contraintes techniques, une étude technico-économique réalisée par une entreprise qualifiée, etc. devra alors être jointe à la demande d’autorisation d’urbanisme
(cf. I. art. R. 171-35 CCH & R. 111-25-19 CU).

Quelle incidence sur la durée de validité de l’AU ?

Pour prendre en considération l’engagement financier important lié au respect de ces obligations, le décret a ajouté une subtilité à l’article R. 424-17-1 CU : par dérogation, la caducité de l’autorisation d’urbanisme en tant qu’elle porte sur un projet satisfaisant aux obligations de « verdissement » est acquise en cas d’interruption des travaux pendant 2 ans (et non 1 an).

Dérogation « espèces protégées » : le décret n° 2023-1366 du 28 décembre 2023 identifie les installations de production d’énergies renouvelables réputées répondre à une raison d’intérêt public majeur

Le développement des installations de production d’énergies renouvelables pose régulièrement la question de la nécessité d’obtenir une dérogation à l’interdiction de destruction, de capture ou d’enlèvement, de perturbation intentionnelle des espèces protégées ainsi que de destruction, d’altération ou de dégradation de leurs habitats, visée à l’article L. 411-2, 4° du code de l’environnement. Son octroi est soumis à trois conditions parmi lesquelles figure la circonstance que le projet réponde à une raison impérative d’intérêt public majeur (RIIPM). Le décret n° 2023-1366 du 28 décembre 2023 pris pour l’application, sur le territoire métropolitain continental, de l’article L. 211-2-1 du code de l’énergie et de l’article 12 de la loi n° 2023-491 du 22 juin 2023, publié au Journal officiel n° 0303 du 30 décembre 2023, identifie les installations de production d’énergies renouvelables (I.) ainsi que les installations de production hydroélectrique (II.) qui sont réputées répondre à une telle définition.

I. Les installations de production d’énergies renouvelables bénéficiant de la RIIPM

Les seuils applicables aux installations de production d’électricité à partir d’énergie solaire

Les projets de production d’électricité à partir d’énergie solaire, implantés sur le territoire métropolitain continental, sont réputés répondre à une RIIPM lorsque deux conditions cumulatives sont remplies.

En premier lieu, la puissance de l’installation doit être supérieure au seuil fixé par le décret :

• en ce qui concerne une installation de production d’électricité d’origine photovoltaïque, la puissance prévisionnelle doit être supérieure ou égale à 2,5 MWc ;

• en ce qui concerne une installation de production d’énergie solaire thermique, la puissance prévisionnelle doit être supérieure ou égale à 2,5 MW .

En deuxième lieu, la puissance totale du parc raccordé au territoire métropolitain continental, à la date de demande de la dérogation, doit être inférieure à l’objectif maximal de puissance défini dans la PPE.

Les seuils applicables aux éoliennes terrestres et aux unités de méthanisation 

Le décret n° 2023-1366 détermine également les conditions cumulatives applicables aux éoliennes terrestres et aux unités de méthanisation.

Outre la condition relative à la non-atteinte des objectifs maximaux de puissance sur le territoire métropolitain continental, au titre de la PPE, pour chaque type d’installation, les seuils applicables sont les suivants :

• la puissance prévisionnelle de l’installation de production d’électricité à partir de l’énergie mécanique du vent doit être supérieure ou égale à 9 MW.

Compte tenu de leur puissance, les projets éoliens offshore bénéficieront de la présomption de RIIPM.

• la puissance annuelle prévisionnelle de l’installation de production de biogaz à l’issue un processus de méthanisation doit être supérieure ou égale à
12 GWh/PCS/an.

II. Les installations de production hydroélectrique bénéficiant de la RIIPM

Les installations de production hydroélectrique concernées par la présomption de RIIPM

Le décret liste les deux types d’installations de production hydroélectriques susceptibles de répondre à une RIIPM, à savoir :

• les projets d’installations de production hydroélectrique gravitaire situées sur le territoire métropolitain continental ;

• les projets de stations de transfert d’énergie par pompage situées sur le territoire métropolitain continental.

Les installations hydroélectriques situées sur les cours d’eau, parties de cours d’eau ou canaux, sur lesquels aucune autorisation générant un nouvel obstacle à la continuité écologique ne peut être octroyée, sont expressément exclues du bénéficie de la présomption de RIIPM.

Les conditions cumulatives afin de bénéficier de la présomption de RIIPM

A l’instar des installations visées ci-dessus, deux conditions cumulatives sont requises pour qu’un projet d’installation de production hydroélectrique soit réputé répondre à une RIIPM, à savoir :

• la puissance prévisionnelle de l’installation doit être supérieure à 1 MW.

Initialement, le projet de décret fixait ce seuil à 3 MW. Les réserves exprimées par les syndicats et associations de professionnels du secteur ont convaincu les rédacteurs du décret d’abaisser ce seuil à 1 MW, permettant ainsi à des plus petits projets hydroélectriques de bénéficier de la présomption de RIIPM.

• la puissance totale du parc hydroélectrique raccordé au territoire métropolitain continental doit être inférieure à l’objectif maximal de puissance défini dans la PPE.

Quelques précisions

1. Le bénéfice de la présomption de RIIPM ne dispense pas les projets concernés de remplir les deux autres conditions cumulatives, non moins exigeantes, à savoir :

• l’absence de solution alternative satisfaisante ;

• le fait que la dérogation ne nuise pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle.

2. Les syndicats et associations de professionnels du secteur ont exprimé des réserves quant aux seuils fixés par le décret, au motif que ceux-ci excluent les plus petits projets du bénéfice de la RIIPM.

Pour ces projets, il reviendra au pétitionnaire de justifier, dans sa demande de dérogation « espèces protégées », en quoi son installation répond à une RIIPM, notamment au regard de sa contribution à la lutte contre le réchauffement climatique et à la sécurité d’approvisionnement en énergie.

Or pour ces installations de puissances moins importantes, une telle démonstration pourra s’avérer délicate.

Abréviations

PPE : programmation pluriannuelle de l’énergie fixée par décret

RIIPM : raison impérative d’intérêt public majeur

SER : syndicat des énergies renouvelables

PCS : pouvoir calorifique supérieur

Loi de finances pour 2024 : que reste-t-il à l’issue des différents « 49.3 » ?

Comme lors de notre précédent bulletin, nous vous proposons un tour d’horizon des principales mesures retenues intéressant les opérations immobilières alors que le projet de loi de finances pour 2024 a fait l’objet de modifications substantielles au Sénat que le gouvernement n’a majoritairement pas reprises dans le texte sur lequel il a plusieurs fois engagé sa responsabilité avant d’être définitivement adopté.

Les principaux points à retenir

Des prorogations confirmées intéressant les dispositifs Denormandie et Malraux

Initialement prorogé d’un an jusqu’au 31/12/2024, le dispositif Denormandie se voit désormais prorogé jusqu’au 31/12/2026 ce qui, gageons-le, permettra aux opérations éligibles le temps nécessaire pour pouvoir enfin être envisagées sereinement (art. 6 bis du PLF).

A noter par ailleurs l’introduction d’une petite correction rédactionnelle laissant à penser qu’une ou plusieurs nouvelles SCPI Denormandie sont vraisemblablement en cours de préparation.

La prorogation d’un an de l’éligibilité du dispositif Malraux au sein des secteurs PNRQAD et NPNRU est, quant à elle, maintenue sans modification (art. 3 undecies du PLF).

Une réforme maintenue de la TVA para-hôtelière

Il résultait en substance d’un amendement adopté au Sénat l’abandon de la notion des services et une soumission à la TVA des seules locations meublées de courte durée avec un seuil de franchise spécifique de chiffre d’affaires de 15 000 €.

Au motif notamment que cet assujettissement aurait eu pour conséquence d’ouvrir un droit corrélatif à déduction pour les loueurs concernés, le gouvernement a repris sa mouture initiale prévoyant une soumission à la TVA distinguant les locations de courte durée (maintien du critère des 3 services sur 4 + ajout d’un nouveau critère lié à la durée du séjour ne devant pas excéder 30 nuitées renouvelables) de celles de longue durée (maintien du seul critère des 3 services sur 4) (art. 10 ter du PLF).

Lorsque le gouvernement confond vitesse et précipitation

Une réforme des modalités d’imposition des locations meublées de courte durée

Alors que la mouture issue de l’Assemblée Nationale alignait les locations de meublés touristiques sur les locations meublées de droit commun (abattement de 50% au lieu de 71% si CA 77 700 € au lieu de 188 700 €), avec une bonification de 21% de l’abattement pour les seuls meublés de tourisme classés en zone rurale, le Sénat est allé plus loin en alignant ce régime sur celui du micro-foncier (abattement de 30% et CA 15 000 €)  avec le maintien du principe de bonification de 21% de l’abattement pour les seuls meublés de tourisme classés en zone rurale (art. 5 duodecies du PLF).

A noter que les modifications en résultant aboutissent à une rédaction quelque peu hasardeuse de l’article 50-0 du CGI, mais l’exposé des motifs des amendements correspondants permet de comprendre la fameuse « volonté du législateur ».

Une réforme maintenue par erreur… et inefficiente ?

Alors que le recours au « 49.3 » aurait pu et dû permettre de revenir sur cette évolution contre laquelle il avait exprimé un avis défavorable, le gouvernement a reconnu l’avoir conservée « par erreur ». Une source gouvernementale a ainsi reconnu que cet article « sera modifié à l’occasion d’un prochain vecteur législatif au plus tard dans le budget 2025 », et que « la disposition n’a pas vocation à s’appliquer dans l’intervalle ». Précisions qu’il s’agit en effet d’une possibilité offerte par la technique dite de la « petite rétroactivité » fiscale, mais qui nécessitera un nouveau vote dans le cadre d’une loi de finances courant 2024.

Le véritable effet de levier fiscal de la location meublée résidant toutefois moins dans le régime micro (en toutes hypothèses réservé aux « petits » loueurs) que dans le régime réel, pour sa part inchangé, cette réforme est donc vouée quoi qu’il arrive à un impact marginal.

Autres évolutions notables retenues par le texte définitif

– Exclusion de la location meublée du périmètre du dispositif Dutreil (art. 3 vicies du PLF)

Après certains ajustements : un certain nombre de dispositifs d’exonération ou d’abattements exceptionnels sur les plus-values immobilières des particuliers en cas de cession de terrains à bâtir ou assimilés (notamment en cas de cessionnaire s’engageant à réaliser des logements sociaux ou intermédiaires) se voit prorogé et/ou aménagé (art. 3 sexies du PLF)

Après certains ajustements : Le bénéfice du taux d’IS de 19% en cas de cession, par une société soumise à cet impôt, de locaux à usage de bureaux, commercial ou industriel ou d’un terrain à bâtir dans certaines zones et destinés à être transformés en habitation ou à accueillir des constructions destinées à cet usage, est étendu aux opérations mixtes sous conditions et se voit limité, sauf exceptions, au 31/12/2026 (art. 5 octodecies du PLF)

Après un ajustement technique : En matière d’IFI, les dettes à exclure pour le calcul de la valeur imposable de titres de société comprendront désormais celles contractées directement ou indirectement par la société et qui se rapportent à un actif non-imposable, mettant fin aux stratégies consistant à « charger » ces sociétés de dettes dont l’objet se rapportait notamment à des actifs mobiliers (art. 3 duovicies du PLF)

Substitution de pièces en cours d’instruction : le Conseil d’Etat officialise la pratique et pose les règles du jeu

Par une décision n° 448905 du 1er décembre 2023, Commune de Gorbio, publiée au Recueil, le Conseil d’Etat officialise la pratique de la « substitution de pièces » en cours d’instruction d’une autorisation d’urbanisme, tout en apportant de précieuses précisions quant à l’incidence d’une telle faculté sur le délai d’instruction de la demande initiale.

I. La pratique de la substitution de pièces en cours d’instruction enfin officialisée par le CE

Principe : absence d’incidence sur le délai d’instruction initial

Comme le rappelle le Conseil l’Etat, le code de l’urbanisme ne prévoit pas expressément que les pétitionnaires puissent spontanément déposer des pièces ou informations complémentaires, en cours d’instruction, après le délai de trois mois imparti pour procéder au dépôt des pièces complémentaires exigées par l’administration.

Une telle faculté était néanmoins de longue date admise par la pratique et la jurisprudence administrative. Il avait en effet déjà été jugé que la modification mineure du projet en cours d’instruction ne donnait pas lieu au déclenchement d’un nouveau délai d’instruction (cf. par ex : TA de Paris, 7 octobre 2010, n° 0814892,  et CAA de Versailles, 28 janvier 2022, n° 20VE01270).

Si le Conseil d’Etat ne fait que confirmer la position de divers juges du fond, cette décision a le mérite de clarifier le cadre juridique applicable en pareille hypothèse ; et de réaffirmer le droit des pétitionnaires de faire évoluer leur projet en cours d’instruction en produisant spontanément de nouvelles pièces, sans suspendre ni proroger le délai d’instruction initial.

Exception: naissance d’un nouveau délai d’instruction

La Haute juridiction pose ensuite les critères permettant de déterminer le point de bascule entre la substitution de pièces et la modification du projet devant s’analyser comme une nouvelle demande de nature à faire naître un nouveau délai d’instruction.

Ainsi, il revient à l’administration d’analyser l’objet des modifications, leur importance et la date à laquelle elles sont présentées afin de déterminer si elle est en mesure de mener à bien l’examen de la demande dans le délai initial, ou si le délai doit être « réinitialisé ».

De la même manière, un bouleversement de la nature du projet s’analysera, semble-t-il, comme une demande nouvelle justifiant un nouveau délai d’instruction.

Les juges du Palais-Royal précisent enfin que, dans une telle hypothèse, l’administration doit informer le pétitionnaire par tout moyen, et impérativement avant le terme du délai d’instruction initialement indiqué, qu’un nouveau délai lui est opposé2.

II. Substitution de pièces et chausse-trappes… Vigilance au moment du dépôt des pièces !

Mieux vaut ne pas subir

En officialisant la pratique de la substitution de pièces, le juge administratif responsabilise les porteurs de projet qui devront procéder à une analyse fine de la nature des pièces à déposer, de la temporalité du dépôt (en évitant d’utiliser la substitution de pièce postérieurement aux avis rendus par les services, notamment le SDIS) mais également des rapports entretenus avec la collectivité et de la charge de travail du service urbanisme concerné.

Sans de telles précautions, les pétitionnaires s’exposeront au risque de se voir opposer un nouveau délai d’instruction susceptible, le cas échéant, de retarder l’exécution du projet avec les incidences qui en découlent (perte des droits sur le terrain en cas de promesse unilatérale de vente conclue sous condition suspensive d’obtention d’un PC notamment), voire de sortir du bénéfice de l’effet protecteur d’un certificat d’urbanisme.

Des réinitialisations de délai difficilement contestables

Le Conseil d’Etat laisse aux services instructeurs la compétence pour apprécier l’objet, l’importance ou la date des pièces substituées qui relèveraient d’une nouvelle demande.

Les faits de l’espèce n’ont cependant pas amené le Conseil d’Etat à préciser si le courrier du service instructeur notifiant le nouveau délai d’instruction – à la suite d’une substitution de pièce – est un acte faisant grief susceptible d’un recours pour excès de pouvoir.

La jurisprudence récente du Conseil d’Etat en matière de courrier de prolongation d’instruction (non conforme au code de l’urbanisme) précise cependant qu’ils sont insusceptibles de recours (cf. CE, 24 octobre 2023, n°462511: une lettre majorant le délai d’instruction d’une demande d’autorisation d’urbanisme n’est pas une décision faisant grief susceptible de faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir). Tout laisse à penser qu’il en sera de même pour les courriers de notification d’un nouveau délai légal d’instruction, lesquels pourront être, même entachés d’illégalité, particulièrement difficiles à contester.

2Bien que cela ne soit pas expressément précisé par le CE, le nouveau délai d’instruction notifié par l’administration, au motif que les pièces substituées s’analysent comme une nouvelle demande, devrait être l’un des délais légaux prévus par le code d’urbanisme (art. R. 423-23 c. urb. et suiv.).

Pour rappel, le CE a récemment (cf. CE, 24 octobre 2023, n°462511, Rec. Leb.) étendu sa jurisprudence  « Commune de Saint Herblain » (CE, 9 décembre 2022, n° 454521, Rec. Leb.) aux majorations de délais d’instruction. Ainsi, une modification du délai d’instruction, bien que notifiée dans le délai d’un mois prévu à l’article R. 423-18 du code de l’urbanisme, qui ne serait pas motivée par l’une des hypothèses de majoration prévues aux articles R. 423-24 à R. 423-33 du même code, n’a pas pour effet de modifier le délai d’instruction de droit commun à l’issue duquel naît un permis tacite ou une décision de non-opposition à déclaration préalable et ne fait pas obstacle, par voie de conséquence, à l’obtention tacite d’une telle autorisation.

Point de vigilance: Le nouveau délai d’instruction n’est opposable que s’il est notifié dans le mois suivant la réception des pièces substitués : « 3. Si la production spontanée de pièces par le pétitionnaire, notamment lorsqu’elles modifient substantiellement la consistance du projet, peut faire obstacle à la naissance d’un permis tacite à l’issue du délai d’instruction, il incombe néanmoins dans cette hypothèse à l’administration, sauf circonstances très particulières, telle la reconnaissance expresse de l’existence d’un nouveau délai d’instruction par le pétitionnaire lui-même, d’informer ce dernier du nouveau délai d’instruction dans un délai d’un mois à compter de la réception des pièces complémentaires » (cf. TA Montreuil, 11 mars 2020, n° 1901122)

Le cadre réglementaire de la commercialisation de titres de sociétés

Proposer au public la souscription de titres de sociétés (actions, obligations…) est un excellent moyen de lever des capitaux. Dans la mesure où elle s’accompagne d’une communication suffisamment précise à l’égard des souscripteurs potentiels, cette pratique constitue une offre publique de titres financiers, selon la définition qu’en donne le règlement UE « Prospectus » du 14 juin 2017.

Mais l’offre publique de titres financiers fait l’objet d’une réglementation éparse et complexe, qui se superpose aux règles classiques du droit des sociétés, assortie de lourdes sanctions, dont on trouvera ci-après une synthèse.

1 Le placement de titres (art. L. 321-1 du Code monétaire et financier) est un service financier réglementé consistant à rechercher des souscripteurs ou des acquéreurs pour le compte d’un émetteur. Il ne peut être exercé que par un prestataire de services d’investissement (PSI) agréé par l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR).

NB : un conseiller en investissement financier n’a pas qualité pour exercer personnellement une activité de placement de titres. Il peut en revanche avoir une activité de conseil en haut de bilan (activité connexe non réglementée), ou intervenir comme apporteur d’affaires d’un PSI.

2 Le démarchage (art. L. 341-1 du CMF) est défini comme toute prise de contact non sollicitée, par quelque moyen que ce soit, avec une personne physique ou morale déterminée en vue d’obtenir (entre autres) la réalisation d’une opération sur un instrument financier (par exemple, acquisition ou souscription). L’activité de démarcheur financier est réglementée (carte de démarcheur, information des clients…).

3 Les investisseurs qualifiés (annexe II directive MIF II 2014/65) sont les Etats, les organismes publics, certains organismes financiers et grandes entreprises. Néanmoins, des particuliers peuvent, à leur demande, être considérés comme investisseurs qualifiés à condition de respecter certains critères, dont le PSI doit veiller au respect, tenant :

•Au nombre de transactions récentes sur instruments financiers,

•A la valeur du portefeuille d’instruments, A la connaissance du secteur concerné.

Les risques

– Une offre publique irrégulière est sanctionnée par la nullité des contrats conclus ou des titres émis (art. L. 411-1 CMF).

– L’Autorité des marchés financiers peut réaliser des contrôles et des enquêtes.

La commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers peut infliger des sanctions administratives en cas de manquement à ses règlements (notamment des sanctions pécuniaires pouvant aller jusqu’à cent millions d’euros).

– Enfin, des sanctions pénales peuvent être encourues : escroquerie, manquement aux règles sur le démarchage financier etc.

FIA : la zone grise

Constitue un fonds d’investis-sement alternatif (FIA) toute entité, hors OPCVM qui « lève des capitaux auprès d’un certain nombre d’investisseurs en vue de les investir, dans l’intérêt de ces investisseurs, conformément à une politique d’investissement que ces FIA ou leurs sociétés de gestion définissent. » (art. L. 214-24 du CMF)

Cette qualification entraîne des obligations contraignantes (société de gestion, dépositaire financier, contrôle de l’AMF).

Il convient donc d’être particulièrement attentif aux  modalités de la levée de fonds et de fonctionnement de la société.

Loi de finances pour 2024 : point d’étape à l’issue de sa première lecture devant l’Assemblée Nationale

Compte tenu d’échanges nourris tant en commissions qu’en séances publiques, le gouvernement a fait le choix de mettre fin à tout débat en engageant sa responsabilité dans le cadre de la procédure dite « de l’article 49.3 ».
Tour d’horizon des principales mesures retenues intéressant les opérations immobilières.

Une stabilité législative bienvenue

Prorogation d’un an du dispositif Denormandie

S’il peut être déploré que cette prorogation ne soit encore que d’une année, l’échéance du dispositif Denormandie se voit repoussée aux investissements réalisés jusqu’au 31/12/2024 (art. 6 bis du PLF).

Rappelons que ce dispositif, par suite d’imprécisions d’éléments de sa définition, puis de la crise sanitaire, et enfin d’une date de fin toujours proche, n’a concrètement pas pu donner sa mesure jusqu’alors. Alors même qu’il s’agit d’un outil particulièrement adapté pour atteindre les objectifs qu’il poursuit de redynamisation des villes moyennes et de transition énergétique des immeubles existants, il a donc failli disparaître au motif qu’il ne « marchait pas » sans même analyser les raisons de cet échec afin d’y remédier utilement.

Prorogation d’un an de l’éligibilité Malraux au sein des secteurs PNRQAD et NPNRU

Les opérations de restauration immobilière réalisées dans ces secteurs peuvent, sous conditions, bénéficier du dispositif Malraux sous réserve notamment que les dépenses y afférentes soient acquittées au plus tard jusqu’au 31/12/2023.

C’est donc ce délai d’éligibilité des dépenses qui vient d’être prorogé d’un an, soit jusqu’au 31/12/2024 (art. 3 undecies du PLF). Comme pour le dispositif Denormandie, nous ne pouvons donc que déplorer cette prorogation seulement annuelle en ce qu’elle ne permet pas la visibilité nécessaire au bon déroulé de ces opérations, étant précisé qu’il aurait pu y être remédié de manière assez simple en substituant le critère de la date de la dépense par celui de la date d’obtention de l’autorisation d’urbanisme sous-jacente

Une pression accrue sur les locations meublées

Réforme du régime micro bénéficiant aux meublés de tourisme classés

Pouvant actuellement bénéficier d’un abattement forfaitaire de 71% applicable au chiffre d’affaires, sous réserve que ce dernier n’excède pas 188 700 €, ce régime jugé trop favorable se voit donc aligné sur celui bénéficiant à la location meublée classique : l’abattement est ainsi ramené au taux de droit commun de 50% et la limite de chiffre d’affaires à 77 700 € (art. 5 duodecies du PLF).

Notons que le taux de 71% serait malgré tout conservé pour les meublés de tourisme classés proposés dans des zones géographiques ne se caractérisant pas par un déséquilibre important entre l’offre et la demande de logements, d’une part, sous réserve que le chiffre d’affaires retiré par le contribuable de ses activités de location meublée n’excède pas 50 000 €, d’autre part.

Exclusion de la location meublée du périmètre d’application du dispositif Dutreil

Alors même que deux décisions récentes de la Cour de Cassation et du Conseil d’Etat ont pu laisser entrevoir une nouvelle possibilité d’éligibilité de l’activité de location meublée au dispositif Dutreil, ces espoirs se voient douchés par l’évolution contenue par le PLF qui, non seulement, exclut désormais expressément cette activité tout en précisant, de surcroît et pour éviter tout effet d’aubaine, que cette exclusion s’applique aux transmissions intervenues à compter du 17 octobre 2023 (art. 3 vicies du PLF).

A noter par ailleurs la précision apportée selon laquelle l’activité éligible de la société transmise ne doit pas être accomplie à titre exclusif dès lors qu’elle en constitue l’activité principale. Aussi, ces évolutions sont apportées « dans l’attente d’autres précisions qui pourraient centrer la mesure sur la transmission d’actifs professionnels ».

Autres évolutions notables prévues par le PLF

– Sans revenir sur la récente saga liée à la remise en cause de l’actuel régime d’assujettissement à la TVA des locations para-hôtelières (cf. notre précédent bulletin), un amendement gouvernemental (art. 10 ter du PLF) modifie le régime légal pour sécuriser les opérations en cours et à venir en instaurant une distinction entre les locations de courte durée (maintien du critère des 3 services sur 4 + ajout d’un nouveau critère lié à la durée du séjour ne devant pas excéder 30 nuitées renouvelables) et celles de longue durée (maintien du seul critère des 3 services sur 4).

– Un certain nombre de dispositifs d’exonération ou d’abattements exceptionnels sur les plus-values immobilières des particuliers en cas de cession de terrains à bâtir ou assimilés (notamment en cas de cessionnaire s’engageant à réaliser des logements sociaux ou intermédiaires) se voient prorogés et/ou aménagés (art. 3 sexies du PLF).

– Le bénéfice du taux d’IS de 19% en cas de cession, par une société soumise à cet impôt, de locaux à usage de bureaux, commercial ou industriel ou d’un terrain à bâtir dans certaines zones et destinés à être transformés en habitation ou à accueillir des constructions destinées à cet usage se voit limité, sauf exceptions, au 31/12/2026 (art. 5 octodecies du PLF).

– En matière d’IFI, les dettes à exclure pour le calcul de la valeur imposable de titres de société comprendront désormais celles contractées directement ou indirectement par la société et qui se rapportent à un actif non-imposable, mettant fin aux stratégies consistant à « charger » ces sociétés de dettes dont l’objet se rapportait notamment à des actifs mobiliers (art. 3 duovicies du PLF).

– En définitive les modalités de calcul des plus-values des LMNP ne se voient pas réformées, pour l’instant !